Législatives 2024 : simulation scrutin à un tour et proportionnelle

26/07/2024

Patrick AULNAS

Les élections législatives de 2024 ont conduit à une Assemblée nationale divisée, dans laquelle aucune majorité absolue ne pourra se dégager pour former un gouvernement. Qu’en serait-il avec d’autres modes de scrutin ? Les calculs ci-après répondent à cette question.

 

Seul le scrutin uninominal à un tour aurait permis de dégager une majorité absolue

En utilisant les résultats du premier tour du 30 juin 2024 fournis par le ministère de l’Intérieur, il est possible de réaliser une simulation de ces résultats avec d’autres modes de scrutin. Le fichier Excel des calculs est consultable ICI.

Voici le regroupement par grandes tendances :

 

REGROUPEMENT PAR GRANDES TENDANCES

Nombre de sièges obtenus

Liste des nuances

Uninominal 2 tours

Résultats réels

Uninominal 1 tour

Simulation

Proportionnelle

Simulation

Rassemblement national

125

258

177

Union de la gauche et isolés gauche

192

156

177

Ensemble et Horizons

159

65

121

Les Républicains

39

16

40

Extrême droite

18

40

24

Divers droite

27

17

22

Divers gauche

 

13

9

Divers centre

6

3

7

Divers

11

9

 

TOTAL

577

577

577

 

Aucun parti n’obtient à lui seul la majorité absolue, même avec le scrutin uninominal à un tour utilisé au Royaume-Uni. Ce scrutin a pour effet d’accentuer l’effet majoritaire. Le parti recueillant le plus de voix dispose d’un nombre de sièges nettement plus important que la proportionnalité. Le RN aurait bénéficié d’un tel mode de scrutin (258 sièges) au détriment des autres partis. Mais la majorité absolue (289 sièges) n’est pas atteinte. Avec l’apport des 40 élus classés « Extrême droite », on obtient cependant 298 sièges. La majorité absolue serait donc atteinte par une coalition de la droite nationale et extrême.

Evidemment, les tactiques électorales des partis n’auraient pas été les mêmes avec un scrutin majoritaire à un tour. Ces résultats sont donc à interpréter avec précaution. Mais il ne fait aucun doute que le RN, parti nettement dominant en nombre de voix, aurait été avantagé. La représentation proportionnelle appliquée aux résultats du 1er tour ne lui donne en effet que 177 sièges.

L’effet du « front républicain », a donc joué à plein contre la droite nationale et extrême puisque cette tendance n’obtient que 143 sièges (125+18) dans l’assemblée élue le 7 juillet 2024.

 

Un corps électoral fracturé en trois blocs équivalents

Il est intéressant de regrouper les résultats précédents en trois blocs.

 

REGROUPEMENT EN 3 BLOCS

Nombre de sièges obtenus

 

Uninominal 2 tours

Résultats réels

Uninominal 1 tour

Simulation

Proportionnelle

Simulation

Gauche

192

169

186

Centre et droite modérée

231

101

190

Droite nationale et extrême

143

298

201

Divers

11

9

 

TOTAL

577

577

577

 

Il faut raisonner à partir de la représentation proportionnelle qui attribue à chaque tendance un nombre de sièges proportionnel au nombre de voix obtenues au premier tour. Trois blocs équivalents apparaissent puisqu’il n’y a que 15 sièges de différence entre le plus puissant (droite nationale et extrême) et le plus faible (gauche).

Ces trois blocs résultent des stratégies partisanes actuelles. Leur cohérence idéologique est variable.

La gauche s’unit pour des raisons purement électoralistes mais des désaccords profonds existent entre LFI et les sociaux-démocrates. Ils sont incapables de gouverner ensemble. La recherche d’un Premier ministre commun n’est que comédie politicienne.

Le centre et la droite, en accord sur de nombreux points, n’ont pas conclu d’alliance pour des raisons de tactique électorale et d’hubris des dirigeants des différentes tendances. Ils ne souhaitent pas gouverner ensemble.

La droite nationale a concocté un programme très social, beaucoup plus proche d’un programme de gauche que du libéralisme économique. L’extrême droite classique (tendance Zemmour) est beaucoup plus réticente sur l’interventionnisme économique de l’État.

La France est donc ingouvernable mais il ne faut pas en imputer la responsabilité aux français. Ce sont les partis, et plus précisément leurs leaders, qui portent la responsabilité pleine et entière de cette situation. Ambitions personnelles et tactiques électoralistes se conjuguent pour obtenir des sièges et des postes sans jamais tenir compte de l’intérêt du pays.

Le pouvoir législatif était déjà affaibli par le comportement indigne de certains députés confondant harangue sur les marchés et discours politique de haut niveau. Il l’est désormais structurellement par l’incapacité des députés à représenter le pays. Très nombreux sont ceux qui n’ont pas compris qu’après leur élection ils représentent le pouvoir législatif français et non leur parti ou les électeurs de leur circonscription.

Pauvre France. Qui parle encore en ton nom ?

Commentaires

  • Pierre Henri DREVON
    • 1. Pierre Henri DREVON Le 03/08/2024
    « Pauvre France. Qui parle encore en ton nom ? »

    Personne.

Ajouter un commentaire