Législatives 2024 : réalité et fiction
13/07/2024
Patrick AULNAS
Une lecture romanesque des résultats des législatives 2024 s’est propagée dans les médias à la vitesse de la lumière. A l’ère du tout numérique, rien de plus normal, direz-vous. Pourtant, la réalité mérite de temps à autre qu’on lui prête un peu d’attention. L’assemblée qui vient d’être élue ne représente pas du tout la population française.
Le roman politique, loin de la réalité
La fiction politique a commencé avec l’allocution de Jean-Luc Mélenchon dans les minutes suivant les estimations médiatiques des résultats. Pour le populiste en chef de la gauche, tout est archi-simple : le Nouveau front populaire (NFP) a gagné les élections et son programme doit être mis en œuvre.
Les socialistes et les écologistes n’ont pas démenti. Logique puisqu’ils avaient ratifié un programme économiquement suicidaire, imposé en grande partie par LFI. Petite digression historique : voilà environ un demi-siècle que la gauche joue à ce petit jeu malsain. Elle s’était déjà unie dans la décennie 1970 en incorporant à son programme commun des exigences communistes, en particulier la nationalisation de secteurs entiers de l’économie. Mises en œuvre dans la décennie 1980, ces nationalisations ont été abrogées en grande partie au cours de la même décennie. La gauche a depuis un demi-siècle une stratégie totalement cynique de conquête du pouvoir puisque ses leaders savent que leurs propositions relèvent du pur discours politique, bref de la fiction populiste.
Après l’annonce des résultats, les médias, trop contents de disposer de grain à moudre, envisagent les hypothèses le plus farfelues de constitution d’un gouvernement, en particulier un gouvernement NFP. On peut difficilement reprocher aux journalistes d’élaborer un récit parcourant toutes les hypothèses imaginables. Mais nous sommes encore dans le roman politique, loin de la réalité.
La réalité : les chiffres des résultats
Ces chiffres figurent sur le site du ministère de l’Intérieur et il suffit de faire quelques additions pour retrouver la réalité politique française. En se limitant aux principales tendances, on obtient les chiffres suivants :
Pourcentage des suffrages exprimés et nombre de sièges obtenus
|
1er tour |
2e tour |
Sièges |
Droite radicale (1) |
34,44% |
37,21% |
143 |
Droite modérée (2) |
7,08% |
5,85% |
65 |
Majorité présidentielle (3) |
21,98% |
24,74% |
166 |
Union de la Gauche |
28,06% |
25,68% |
184 |
(1) RN + Union de l’extrême droite + Reconquête + Extrême droite + Droite souverainiste
(2) Les Républicains + UDI
(3) Ensemble + Horizon + Divers centre
Trois quasi-évidences apparaissent :
- La droite est majoritaire dans le pays. En considérant que la moitié de la majorité présidentielle a une sensibilité de droite, on obtient 52,5% au 1er tour et 55,4% au 2e tour.
- La gauche est très minoritaire et n’atteint même pas 30% des suffrages exprimés au 2e tour avec le jeu du « front républicain », qui consiste à stigmatiser l’adversaire sur le plan moral pour propager la peur. Le vote en faveur du NFP est donc en partie un vote de rejet du RN et non un vote d’adhésion. Il serait totalement illégitime d’appliquer le programme du NFP avec des résultats aussi faibles.
- Le nombre de sièges ne correspond pas à la logique de base du scrutin majoritaire. Ce mode de scrutin a pour objectif de dégager une majorité nette en favorisant les tendances recueillant le plus de suffrages. En principe, la tendance majoritaire obtient un nombre de sièges plus élevé que sa proportion des suffrages exprimés. En 2024, la gauche et la majorité présidentielle ont été avantagés par la propagande en faveur du « front républicain ». Le RN et ses alliés ont été lourdement défavorisés.
Grave atteinte à la démocratie
L’assemblée qui vient d’être élue n’est absolument pas représentative des courants politiques dans la population française. Le pays légal ne cesse de s’éloigner du pays réel. Les manœuvres d’appareil aboutissent à une véritable remise en cause de la démocratie elle-même. L’alliance de gauche baptisée NFP n’avait que des objectifs électoralistes. Le programme commun rédigé à la hâte devait donc être le plus démagogique possible.
Le prétendu « front républicain » relève de subterfuges des états-majors des partis pour faire naître par le verbe un ennemi de la République, en l’occurrence le RN. Il s’agit de s’opposer, jamais d’adhérer. La démocratie, c’est le contraire.
Le peuple se sent trahi quand ceux qui possèdent le savoir, l’influence médiatique et les leviers de commande des organisations cherchent par tous les moyens à étouffer sa parole. Il se sent méprisé par tous ceux qui attisent sa haine en invoquant constamment la supériorité morale de leur vision de l’avenir. Il n’admettra pas encore longtemps qu’une infime minorité de leaders et de cadres politiques instrumentalise les médias et empêche systématiquement le jeu loyal de la démocratie.
Rendez-vous aux prochaines échéances.
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