Jean-Charles Rémond

 
 

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Patrick AULNAS

 

Portrait

 

Jean-Pierre Dantan. Portrait de Jean-Charles-Joseph Rémond (1835)

Jean-Pierre Dantan. Portrait de Jean-Charles-Joseph Rémond (1835)
Sculpture, ronde-bosse, hauteur 18,5 cm, musée Carnavalet, Paris.


Biographie

1795-1875

Jean-Charles-Joseph Rémond, naît le 19 avril 1795 à Paris. Il est le fils d’un imprimeur spécialisé dans la gravure. A partir de 1809, il se forme à la peinture auprès de Jean-Baptiste Regnault (1754-1829), peintre de sujets mythologiques et de portraits, appartenant au courant néoclassique. En 1814, il entre à l’École des Beaux-Arts de Paris où il a pour maître Jean-Victor Bertin (1867-1742) peintre paysagiste néoclassique.

Dès cette époque, il expose des paysages historiques au Salon de peinture et de sculpture. La peinture de paysage à caractère historique acquiert à cette époque ses lettres de noblesse et devient l’égale de la peinture mythologique et religieuse. Pierre-Henri de Valenciennes a beaucoup contribué à cette évolution. Avec L'Enlèvement de Proserpine par Pluton (1821), Jean-Charles Rémond remporte à l'unanimité du jury le Grand Prix de Rome du paysage historique, qui venait d’être créé en 1816. Ce prix place l’artiste parmi les plus grands paysagistes de son temps. Le prix étant décerné tous les quatre ans, il est le deuxième artiste à le recevoir, après Achille Michallon (1796-1822) en 1817.

 

Jean-Charles Rémond. L’enlèvement de Proserpine par Pluton (1821)

Jean-Charles Rémond. L’enlèvement de Proserpine par Pluton (1821)
Huile sur toile, 114 × 146 cm, Bibliothèque de l'Ecole des Beaux-Arts, Paris.

 

De 1821 à 1826, Rémond vit en Italie où il accumule de nombreux dessins pris sur le vif. Il voyage également en Suisse. Revenu à Paris en 1826, il ouvre un atelier qui produira jusqu’à 1848, date à laquelle le peintre cesse d’exposer. Il eut plusieurs élèves, dont Théodore Rousseau (1812-1867), considéré comme le cofondateur de l'école de Barbizon, qui conduisit la peinture de paysage vers le réalisme.

Jean-Charles Rémond meurt à Paris le 9 juillet 1875.

 

Œuvre

 

Le début du 19e siècle est l’époque où la peinture de paysage devient l’égale de la peinture mythologique, religieuse ou historique. Cette dernière verra son influence décliner tout au long du siècle, supplantée par les scènes de genre et le paysage, thèmes de prédilection des impressionnistes. L’influence de Pierre-Henri de Valenciennes (1750-1819) fut considérable. Outre son œuvre de grand paysagiste, il théorisa ce que devait être l’art des paysages néoclassiques en peinture. La composition paysagère n’a pas pour objectif de représenter avec fidélité un paysage réel, mais le peintre doit cependant réaliser des esquisses multiples sur le motif afin de s’imprégner du milieu naturel et de ses variations selon les saisons ou l’heure de la journée. Il pourra ensuite recomposer sur un tableau de vastes dimensions un paysage idéal. Le paysage peint s’inspire de la réalité pour ne pas la trahir mais il doit être plus beau que le paysage réel. Tel est le credo néoclassique.

 

Jean-Charles Rémond. Ulysse et Nausicaa (1830)

Jean-Charles Rémond. Ulysse et Nausicaa (1830)
Huile sur toile, 156 × 196 cm, musée des Beaux-Arts de Nantes.

 

Les successeurs de Pierre-Henri de Valenciennes respecteront ces préceptes jusqu’à ce que le courant réaliste et les peintres de l’École de Barbizon prennent le relai, abandonnant l’idéal néoclassique du paysage arcadien (évoquant l’Arcadie mythique chantée par les poètes antiques). Grand professeur, Valenciennes eut des élèves célèbres comme Jean-Victor Bertin (1767-1742) et Achille-Etna Michallon (1796-1822). Jean-Charles Rémond eut lui-même Bertin pour professeur.

Rémond est ainsi l’un des plus jeunes néoclassiques, dont la peinture sera influencée peu à peu par le courant romantique. Après avoir pratiqué le dessin et la peinture sur le motif en Italie et en Suisse dans sa jeunesse, il devient l’un des plus prisés de paysagistes français. Ses tableaux se caractérisent par une grande luminosité liée à la place prépondérante accordée au ciel. A partir du Salon de 1830, où triomphe le romantisme, il infléchit la quiétude néoclassique pour faire du paysage le lieu d’une dramaturgie où l’homme est à la merci des puissances de la nature.

 

Jean-Charles Rémond. Vue du village et du pont de Crevola, sur la route du Simplon à Domodossola (1832)

Jean-Charles Rémond. Vue du village et du pont de Crevola, sur la route du Simplon à Domodossola (1832)
Huile sur toile, 156 × 195 cm, musée des Beaux-Arts de Nantes.

 

Mais ce romantisme peut aussi induire le rêve et la nostalgie des voyages vers les pays lointains.

 

Jean-Charles Rémond. Vue d’Ischia depuis la mer (1842)

Jean-Charles Rémond. Vue d’Ischia depuis la mer (1842)
Huile sur papier, marouflée sur toile, 25,7 × 35,9 cm, Metropolitan Museum of Art, New York.

 

 

Jean-Charles Rémond. La mort d’Hippolyte (1819)

Jean-Charles Rémond. La mort d’Hippolyte (1819). Huile sur toile, 82 × 100 cm, collection particulière. « Peint par l’artiste en 1819, La Mort d’Hippolyte est l’une des premières œuvres majeures de Rémond. Bien qu’elle n’ait pas été exposée au Salon, elle n’en a pas moins une importance considérable dans cette période précédant son séjour en Italie, en raison de sa taille et de son ambition.
Sous un ciel orageux et menaçant, à la périphérie de la ville de Troezen, dans un paysage tumultueux qui reflète le caractère dramatique de la scène, Rémond a habilement exposé la tragédie qui se déroule sous nos yeux. Hippolyte est mortellement blessé après avoir été traîné par ses chevaux effrayés par le monstre envoyé par Thésée, jaloux du jeune homme. Les chevaux sont déjà loin. Il meurt dans les bras des vieux Théramène, tandis que son amante Aricie, le voyant expirer, s’évanouit dans les bras de sa servante Ismène. Plutôt que de s’inspirer directement des sources antiques, racontant la mort solitaire d’Hippolyte, le peintre s’est tourné vers Racine et sa célèbre pièce Phèdre (Racine, Phèdre, 1677, acte V, scène VI, lignes 1535-1560).
Si le sujet et la composition de Rémond suivent les préceptes du paysage néoclassique, il introduit néanmoins déjà une vision sublime et romantique du rapport de l’humanité à la nature, qui répond au drame puissant qui vient de se dérouler. » (Commentaire Sotheby’s)

Jean-Charles Rémond. Paysage arcadien (1820)

Jean-Charles Rémond. Paysage arcadien (1820). Huile sur toile, 38 × 46,3 cm, collection particulière. Ce paysage montagneux évoque le locus amoenus chanté par les poètes grecs. Les petits personnages, habillés à l’antique, vivent en parfaite harmonie avec une nature accueillante et nourricière. Un ensemble architectural, plus ou moins évocateur de l’Antiquité, a été placé sur les hauteurs, en arrière-plan. Jean-Charles Rémond est ainsi fidèle à l’ambition du paysage néoclassique : recréer par la magie de l’art une nature idyllique et d’une beauté surpassant le réel.

Jean-Charles Rémond. L’enlèvement de Proserpine par Pluton (1821)

Jean-Charles Rémond. L’enlèvement de Proserpine par Pluton (1821). Huile sur toile, 114 × 146 cm, Bibliothèque de l'Ecole des Beaux-Arts, Paris. Le thème s’inspire de l’une des innombrables anecdotes de la mythologie gréco-romaine. Proserpine, fille de Jupiter et de Cérès, déesse de l’agriculture, cueillait des fleurs en compagnie de ses amies. C’est à ce moment que Pluton, dieu des enfers l’enlève. Elle passera désormais six mois aux Enfers, au cours desquels le chagrin de Cérès fera mourir les plantes sur la terre (automne, hiver), puis six mois avec sa mère dont la joie fera renaître les végétaux (printemps, été). Le mythe romain provient du mythe grec (Déméter = Cérès, Zeus = Jupiter, Perséphone = Proserpine, Hadès = Pluton). Le paysage de Rémond associe une luminosité intense et de multiples nuances de vert et de jaune dans le feuillage vaporeux des grands arbres.

Jean-Charles Rémond. Vue de Tivoli depuis une grotte (1823)

Jean-Charles Rémond. Vue de Tivoli depuis une grotte (1823). Huile sur toile, 25 × 33 cm, collection particulière. Exécuté en Italie, ce tableau du jeune artiste oppose la luminosité du paysage à la pénombre de la grotte où se situe l’observateur. Mais, la peinture ne reproduit pas le paysage exact car elle n’a pas été réalisée sur le motif mais en atelier à partir d’esquisses. Il s’agit d’une composition paysagère inspirée d’une réalité observée.

Jean-Charles Rémond. Vue du Colisée et de l’Arc de Constantin depuis le Palatin (1822-24)

Jean-Charles Rémond. Vue du Colisée et de l’Arc de Constantin depuis le Palatin (1822-24). Huile sur papier, marouflée sur toile, 27 × 39 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. « Cette œuvre se situe à la frontière entre un croquis et une peinture achevée. Les monuments principaux sont représentés comme des fragments d’une composition comportant à parts égales cadre naturel et urbain, monuments antiques et modernes. Au premier plan, les contours brisés d’une rangée herbeuse d’arches anticipent de manière ludique les formes de l’architecture visible au-delà. Cet ensemble pittoresque contraste avec l’échafaudage purement fonctionnel jouxtant le Colisée, qui a été érigé par l’architecte Giuseppe Valadier vers 1822-23 pour mieux stabiliser le long mur extérieur de l’amphithéâtre. » (Commentaire MET)

Jean-Charles Rémond. Vue du Cap Misène et du Lac d’Averne (1820-25)

Jean-Charles Rémond. Vue du Cap Misène et du Lac d’Averne (1820-25). Huile sur toile, 83 × 122 cm, collection particulière. « Vue du Cap Misène et du Lac d’Averne près de Naples a été peint entre 1820 et 1825, lors du premier voyage du jeune artiste dans la campagne italienne. Dans ce tableau, le jeune artiste est évidemment séduit par l’intensité de la couleur et de la lumière, si différente de celle de sa France natale. Le ciel est peint dans un bleu entièrement saturé, qui se fond dans les jaunes et les lavandes du ciel occidental alors que le soleil se couche derrière la montagne maintenant enveloppée d’ombre. La lumière déclinante illumine encore la mer, le sommet des ruines et les figures des paysannes revenant d’une promenade. Les jeunes filles, ainsi que le berger qui surveille son troupeau, sont pleinement intégrés dans le paysage. » (Commentaire catalogue Christie’s)

Jean-Charles Rémond. Ulysse et Nausicaa (1830)

Jean-Charles Rémond. Ulysse et Nausicaa (1830). Huile sur toile, 156 × 196 cm, musée des Beaux-Arts de Nantes. Le tableau illustre une anecdote de l’Odyssée d’Homère. Nausicaa, princesse phéacienne, est occupée à laver son linge avec ses suivantes. Leurs cris réveillent Ulysse, échoué après le naufrage de son navire. Nu et sale, il fait fuir toutes les suivantes et seule Nausicaa a l’audace de prendre soin de lui. Dans un paysage grandiose, Rémond traite le moment où apparaît Ulysse, provoquant la frayeur des suivantes mais pas celle de Nausicaa.

Jean-Charles Rémond. Vue du village et du pont de Crevola, sur la route du Simplon à Domodossola (1832)

Jean-Charles Rémond. Vue du village et du pont de Crevola, sur la route du Simplon à Domodossola (1832). Huile sur toile, 156 × 195 cm, musée des Beaux-Arts de Nantes. Le col du Simplon relie Brigue, en Valais, à Domodossola, en Italie du Nord. Rémond, influencé par le romantisme, introduit une forte dramaturgie paysagère en associant le fragile pont surplombant un torrent et le ciel aux nuages noirs annonçant l’orage.

Jean-Charles Rémond. Vue des Alpes depuis Crevola (1835)

Jean-Charles Rémond. Vue des Alpes depuis Crevola (1835). Huile sur toile, 112 × 160 cm, musée des Beaux-Arts de Melun. « Le rôle joué par Pierre-Henri de Valenciennes (1750-1819), par Achille-Etna Michallon (1796-1822), puis par Jean-Charles Rémond dans le renouveau du paysage, mais aussi par l’évolution de l’enseignement de la technique du paysage et par le cheminement vers la peinture de plein air, est essentiel.
Grand Prix de Rome, ancien élève de Bertin et de Regnault, Rémond voyage beaucoup en Italie et en Suisse. Durant ses divers voyages, il peint de nombreuses études en plein air qu’il réutilise ensuite dans des compositions plus ambitieuses, telles la Vue des Alpes depuis Crévola, exposée au Salon en 1835. Il invita également ses élèves, notamment Théodore Rousseau, à aller peindre sur le motif à Saint-Cloud, à Sèvres ou en forêt de Fontainebleau. » (Commentaire musée des Beaux-Arts de Melun)

Jean-Charles Rémond. La mort d’Abel (v. 1837)

Jean-Charles Rémond. La mort d’Abel (v. 1837).  Huile sur toile, marouflée sur bois, 38 × 46 cm, musée Fabre, Montpellier. « Au Salon de 1838, Rémond expose un grand paysage à sujet biblique : La Mort d’Abel. Selon le Livre de la Genèse, Abel et Caïn, les deux premiers fils d’Adam et Ève, cherchaient la reconnaissance de Dieu. L’aîné, cultivateur, jalousait son frère cadet qui était berger. Lorsqu’un jour l’offrande d’Abel, un agneau, se consuma, preuve de l’agrément divin, et que celle de Caïn fut rejetée, ce dernier entra dans une colère immense et tua son frère. Le premier meurtre de l’humanité fut donc un fratricide. Comme le veut l’usage dans le genre du paysage historique, la part narrative de l’œuvre de Rémond est ici réduite à un détail au sein d’un paysage dominant. Au premier plan sur la droite, le corps lumineux du jeune Abel est étendu près du foyer sacrificiel. Son frère Caïn nous tourne le dos et s’éloigne dans la pénombre. La scène est nichée dans un paysage fait de roches et de végétation. Dans le lointain, une étendue d’eau se termine en cascade, symbole de la chute, et le ciel bleu se couvre de nuages qui annoncent la colère divine. Le tableau, qui reçut un excellent accueil au Salon, est aujourd’hui exposé au musée Fabre à Montpellier. » (Commentaire Galerie La Nouvelle Athènes)

Jean-Charles Rémond. Vue d’Ischia depuis la mer (1842)

Jean-Charles Rémond. Vue d’Ischia depuis la mer (1842). Huile sur papier, marouflée sur toile, 25,7 × 35,9 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. Cette Vue de l’île d’Ischia dans le golfe de Naples constitue surtout un travail sur la lumière vespérale. Le néoclassicisme pur des débuts devient vraiment ici romantisme. Ciel ennuagé aux couleurs chaudes, bateau évoquant les voyages lointains, mer à la surface presque immobile… Il s’agit de rêver et sans doute de suggérer la nostalgie.

Jean-Charles Rémond. Bâtiments à Sainte Marie aux Mines, Haut Rhin (1814-48)

Jean-Charles Rémond. Bâtiments à Sainte Marie aux Mines, Haut Rhin (1814-48). Huile sur papier, montée sur toile, 34 × 41 cm, Nationalmuseum, Stockholm. « Rémond, peintre paysagiste, remporte le prix de Rome en 1821. Après quelques années en Italie, il représente les paysages de France. Dans cette vue d’une filature alsacienne, il insiste sur le contraste entre les ateliers pittoresques et sombres du premier plan et le paysage d’arrière-plan à la fois nuageux et ensoleillé. Rémond y fait allusion dans son sous-titre : avec effet de clair-obscur. Il était un peintre de plein air et a saisi la lumière particulière du paysage. » (Commentaire Nationalmuseum)

ean-Charles Rémond. La terrasse de la villa Melzi, surplombant le lac de Côme (1814-48)

Jean-Charles Rémond. La terrasse de la villa Melzi, surplombant le lac de Côme (1814-48). Huile sur toile, 27 × 37 cm, collection particulière. « Cette peinture représente la terrasse semi-circulaire de la Villa Melzi, une résidence néoclassique près de Bellagio sur le lac de Côme, construite entre 1808 et 1810 pour Francesco Melzi d’Eril, vice-président de la République cisalpine. De nombreux invités illustres ont séjourné à la villa, y compris Franz Liszt et Stendhal. La villa, qui existe toujours, est un monument national ouvert au public. » (Commentaire catalogue Sotheby’s)

Jean-Charles Rémond. Vue de l’île d’Ischia près de Naples (1814-48)

Jean-Charles Rémond. Vue de l’île d’Ischia près de Naples (1814-48). Huile sur papier, marouflée sur toile, 27 × 39 cm, collection particulière. Probablement exécuté en Italie, ce petit format à la limite de l’impressionnisme est un travail sur la lumière méditerranéenne.

 

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Jean-Charles-Joseph Rémond

 

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