Étienne Jeaurat
Cliquer sur l'image ci-dessus
PARTENAIRE AMAZON ► En tant que partenaire d'Amazon, le site est rémunéré pour les achats éligibles.
Patrick AULNAS
Portraits
Alexandre Roslin. Portrait du peintre Étienne Jeaurat (18e s.)
Huile sur toile, 128 × 96 cm, musée du Louvre, Paris
Étienne Aubry. Portrait du peintre Étienne Jeaurat (18e s.)
Huile sur toile, 60 × 50 cm, musée Carnavalet, Paris
Biographie
1699-1789
Étienne Jeaurat est né à Paris le 9 février 1699 dans une famille de commerçants en vins. Ses parents, Nicolas Jeaurat et Marie Bourdillat, originaires de Vermenton, petite commune de l’Yonne, étaient venus s’établir à Paris quelques années après leur mariage en 1681. La formation d’Étienne Jeaurat est mal connue. Mais son frère aîné Edmé (1688-1738) devint graveur. Il est probable qu’Étienne rencontra par son intermédiaire le peintre Nicolas Vleughels (1668-1737). Edmé Jeaurat gravait en effet des créations de Vleugels. Le quartier Saint-Victor, où se trouvait la maison des Jeaurat, était d’ailleurs le lieu de résidence de nombreux artistes. La maison de Charles Le Brun (1619-1690) était mitoyenne de celle des Jeaurat.
Étienne Jeaurat. Achille partant pour venger la mort de Patrocle (v. 1738)
Huile sur toile, 136 × 163 cm, musée des Beaux-arts, Cambrai.
Etienne Jeaurat devint donc probablement l’élève de Nicolas Vleughels et celui-ci l’emmena à Rome en 1724 lorsqu’il fut nommé directeur de l’école de Rome. Le jeune peintre dut se plier aux exigences de l’époque et peindre des scènes religieuses et mythologiques pour accéder au plus haut rang de la hiérarchie artistique. A son retour d’Italie, il avait déjà acquis une certaine réputation et fut admis à l’Académie royale de peinture et de sculpture le 24 juillet 1733 en qualité de peintre d’histoire. Son morceau de réception, Pyrame et Thisbé, évoque le suicide de deux amants légendaires de la mythologie antique.
Étienne Jeaurat. Les oies de frère Philippe (1734)
Huile sur toile, 64,1 × 79,4 cm, musée des Beaux-Arts, Valenciennes.
Entre 1737 et 1769, Jeaurat expose régulièrement au Salon officiel en privilégiant dans les scènes de genre. Devenu professeur en 1743, il est nommé recteur de l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1765. En 1767, il devient Garde des Tableaux du roi sur décision du Surintendant des Bâtiments. A ce titre, il est chargé veiller à l’intégrité des collections royales en autorisant les visites ou les déplacements d’œuvres et en établissant leur inventaire. Il conserve ce poste jusqu’à sa mort en 1789. La reconnaissance officielle de l’artiste ne s’arrête pas là. L’Académie comportait quatre recteurs désignés par le roi, ceux-ci élisant un chancelier chargé du suivi des affaires administratives. Jeaurat fut élu chancelier en 1781.
Étienne Jeaurat. Le carnaval des rues de Paris (1757)
Huile sur toile, 65 × 82 cm, musée Carnavalet, Paris.
Étienne Jeaurat vécut dans l’aisance financière. Il avait hérité de la maison parisienne du quartier Saint-Victor et d’une maison à Vermenton. Ses fonctions lui permettaient de disposer de pensions royales. Ses œuvres furent fréquemment reproduites en gravure sur cuivre pour être diffusées sous forme d’estampes sur papier. Jeaurat possédait également des vignes à Vermenton et il retournait presque chaque année dans ce village à l’époque des vendanges. Sa réputation de bon vivant s’accompagnait d’une forte réticence à l’encontre de la vie conjugale. Étienne Jeaurat ne s’est donc jamais marié et n’a pas eu de descendant.
Il meurt à Versailles le 14 décembre 1789 à l’âge de 90 ans, dans un appartement appartenant à la Surintendance des Bâtiments du roi, mis à sa disposition en tant que Garde des Tableaux.
Œuvre
La scène de genre restait au 18e siècle inférieure à la peinture d’histoire dans la hiérarchie académique. Aussi, Étienne Jeaurat dut-il se résoudre à peindre des scènes mythologiques et religieuses, sans marquer à cet égard l’histoire de l’art. Ses scènes de genre constituent par contre des représentations remarquables des mœurs de l’époque. Les historiens y trouvent l’illustration de la vie quotidienne dans les rues de Paris et des scènes d’intérieur concernant principalement la bourgeoisie.
Étienne Jeaurat. Le Marchand d'orviétan ou l'opérateur Barri (v. 1743)
Huile sur toile, 33 × 26,7 cm, musée Cognacq-Jay, Paris.
Jeaurat, observateur avisé, sait restituer par l’image l’anecdote significative du temps et demeure ainsi l’un des rares peintres français du réalisme à une époque où domine sans partage la convention de légèreté du rococo. Souvent comparé négativement à Jean-Siméon Chardin (1699-1779), son exact contemporain, également spécialisé dans les scènes de genre, Jeaurat ne mérite pas cette indignité. La comparaison manque de pertinence puisque Chardin cherche l’éternité dans les scènes du quotidien alors que Jeaurat veut laisser un témoignage précis de son époque.
Étienne Jeaurat. La conduite des filles de joie à la Salpetrière (1757)
Huile sur toile, 65 × 82 cm, musée Carnavalet, Paris.
Au demeurant, les contemporains ne s’y trompaient pas. Jeaurat vendait facilement sa production et devint riche. Les esprits conformistes furent parfois surpris des réactions des connaisseurs, comme le montre cette réplique de la marquise de Pompadour, qui préférait Les citrons de Javotte de Jeaurat aux Grâces enchaînées de Van Loo :
« Nous puisons dans L’Art et les femmes en France par M. A. de la Figelière, l’anecdote suivante : au salon de 1763 Mme de Pompadour désola Van Loo. Il l’escortait et s’empressait de lui expliquer les tableaux ; quand ils arrivèrent devant Les Grâces enchaînées par l’amour, La marquise passa sans les remarquer. Quelqu’un lui dit : " Quoi, Madame, ne faites-vous donc pas attention aux Grâces enchaînées par l’amour de M. Van Loo ? – Ça, des Grâces ? fit-elle dédaigneusement ; ça, des Grâces ! " et elle pirouetta sur ses talons pour aller admirer une seconde fois Les Citrons de Javotte. » (Le peintre Étienne Jeaurat, essai historique et biographique, par Sylvain PUYCHEVRIER, 1862)
Étienne Jeaurat. Les citrons de Javotte (1763)
Huile sur toile, 64 × 80 cm, collection particulière.
Scènes de genre
Étienne Jeaurat. Les oies de frère Philippe (1734). Huile sur toile, 64,1 × 79,4 cm, musée des Beaux-Arts, Valenciennes. Le sujet est tiré d’un conte de Jean de La Fontaine (1621-1695), Les Oyes de Frère Philippe. Philippe, après la perte de sa femme, va vivre en ermite avec son très jeune enfant. L’enfant n’a aucun contact avec le reste du monde. Mais, devenu grand, il demande à son père de l’accompagner à la ville pour acheter de la nourriture. Sur le chemin, les deux hommes croisent de jeunes femmes dont l’allure éblouit l’adolescent. Voici la fin du conte, le père appelant oies les jeunes femmes attirant irrésistiblement son fils. « Ravi comme en extase à cet objet charmant |
Étienne Jeaurat. Le colleur d'affiche (1735-40). Huile sur toile, 84 × 71,5 cm, Musée Carnavalet, Paris. « Le colleur s'apprête à mettre au mur une affiche du Théâtre-Français, en remplacement d'une autre affiche déchirée ; à droite, un personnage en livrée contemple la scène. L'affiche annonce Le mari amoureux de sa femme, autre titre de la pièce de Nivelle de La Chaussée (1692-1754), Le préjugé à la mode, qui avait été créée au Théâtre-Français le 3 février 1735. » (Commentaire Paris Musées) |
Étienne Jeaurat. Bain de femmes (1741). Huile sur toile, 64,5 × 52,5 cm, musée des Beaux-arts de Bordeaux. Ce tableau grivois met en scène des femmes au bain et un homme qui les observe par-dessus le mur. Il pourrait aussi être rattaché aux turqueries en admettant une interprétation occidentale et très libre du hammam. |
Étienne Jeaurat. Le Marchand d'orviétan ou l'opérateur Barri (v. 1743). Huile sur toile, 33 × 26,7 cm, musée Cognacq-Jay, Paris. « La scène d’intérieur associe trois personnages : un malade âgé au teint pâle installé dans son fauteuil et sa jeune épouse qui écoute les préconisations d’un homme en costume oriental portant une boîte de remèdes. Pseudo-guérisseur et charlatan, celui-ci préconise la prise de l’Orviétan, un soin originaire d’Italie à base de miel et de poudres mystérieuses, très prisé au cours du XVIIIe siècle. Le titre de l’œuvre est également une référence directe au conte L’Abbesse malade de Jean de La Fontaine. La peinture décrit une double satire aimable de la vie quotidienne, dénonçant à la fois la différence d’âge entre les époux, écho aux mariages arrangés, et la mode des herbes et médecines vantées et vendues par des médecins improvisés. » (Commentaire Musée Cognacq-Jay) Il existe une variante de ce tableau :
Étienne Jeaurat. La visite du médecin, ou Le Charlatan (1743) |
Étienne Jeaurat. L’accouchée (1744). Huile sur toile, 43,5 × 32,5 cm, musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg. Une servante vient servir une boisson à sa maîtresse, qui a accouché récemment. Jeaurat met l’accent sur la fatigue de la jeune femme : visage blême, regard fixe, position relâchée sur le fauteuil. |
Étienne Jeaurat. Intérieur d’un atelier d’artiste (1755). Huile sur toile, 117,5 × 88,7 cm, Ferens Art Gallery, Kingston-upon-Hull. L’artiste s’inspire sans doute de son atelier avec une œuvre monumentale en cours de réalisation ressemblant à son morceau de réception à l’Académie, Pyrame et Thisbé. |
Étienne Jeaurat. Le carnaval des rues de Paris (1757). Huile sur toile, 65 × 82 cm, musée Carnavalet, Paris. Le carnaval était une fête traditionnelle depuis des siècles. Débutant le jour de l’Épiphanie (6 janvier) et se prolongeant pendant des mois, la période du carnaval était l’occasion de festivités populaires dans les rues de Paris avec déguisements, musique, danse et débordements divers liés en particulier à l’alcool. Jeaurat restitue l’ambiance d’une rue animée de carnaval avec travestissement, enfants dansant, porteur d'eau et de nombreux spectateurs. |
Étienne Jeaurat. La conduite des filles de joie à la Salpetrière (1757). Huile sur toile, 65 × 82 cm, musée Carnavalet, Paris. «La scène se déroule dans la capitale, au débouché du pont de la Tournelle, sur la rive gauche de la Seine, depuis l’île Saint-Louis. La toile comprend une succession de plans : au premier, l’artiste figure des gardes qui encadrent une charrette ouverte, à l’intérieur de laquelle se pressent des femmes et d’autres gardes qui manient le bâton pour assurer le calme. Les bâtiments situés à l’arrière correspondent au fort de la Tournelle. Au second plan, une charrette fermée, munie de barreaux, emporte les prostituées, qui paient pour ne pas être exposées aux yeux du public […] |
Étienne Jeaurat. Chartreux en méditation (1759). Huile sur toile, Église Saint-Bernard-de-la-Chapelle, Paris. « De Jeaurat, des Chartreux en méditation ; c’est pis encore, point de silence ; rien de sauvage ; rien qui rappelle la justice divine ; nulle idée, nulle adoration profonde ; nul recueillement intérieur ; point d’extase ; point de terreur. » (Commentaire de Diderot, Salon 1759) « Jeaurat compose sa scène dans les règles de la composition classique, que Diderot ne reconnaît pas, ou refuse de reconnaître : il délimite une scène centrale de méditation, composée par les deux personnages du premier plan : l’un, à gauche, est absorbé dans sa lecture. L’autre à droite, a délaissé son livre pour méditer, la main sur un crâne, sur la vanité de toutes choses. A l’arrière-plan, faisant contraste avec la scène proprement dite qui donne son titre au tableau, un groupe de moine est en pleine conversation : il figure la réalité ordinaire, par différence de quoi se singularise la scène proprement dite. A l’espace vague de la conversation s’oppose donc l’espace restreint de la méditation. » (Commentaire Unipictura18) |
Étienne Jeaurat. Les citrons de Javotte (1763). Huile sur toile, 64 × 80 cm, collection particulière. « Selon le catalogue du Salon, le sujet du tableau est tiré d'un ouvrage en vers de Vadé. Or Jean-Joseph Vadé était mort en 1757. Une édition de ses œuvres avait paru en 1758, c'est sans doute là que Jeaurat lut la poésie dont le tableau est tiré. On sait que le peintre bon vivant, aimait les contes poissards (*) de Vadé; il a représenté autour d'une table trois émules du poète : Piron, Panard et Collé. » (Commentaire Beaussant Lefèvre & associés, commissaires-priseurs) |
Étienne Jeaurat. Les Écosseuses de pois de la Halle (1759-89). Huile sur toile, 120 × 145 cm, musée Carnavalet, Paris. La scène se situe au marché des Innocents, dans l’actuel 1er arrondissement de Paris. Jeaurat saisit l’animation du jour de marché avec danse, marchandes des quatre saisons, écosseuses de pois (à droite). |
Étienne Jeaurat. La favorite du sultan (1730-89). Huile sur toile, 50 × 74,5 cm, Pera Museum, Istamboul. « Ce tableau représente un couple dans une salle d’un palais de style turc. Il s’agit d’une turquerie de Jeaurat, un des peintres définis par Boppe comme peintres turcs. Ces peintres, qui n'étaient jamais allés dans l'Empire ottoman, ont réalisé des tableaux orientalistes, avec des personnages en costumes turcs correctement rendus. Ces tableaux comprenaient également des accessoires, comme le tabouret en velours de style typiquement rococo, et de la décoration intérieure européenne. Un autre tableau de composition similaire, du même artiste, se trouve au Musée Groesbeeck de Croix à Namur. » (Commentaire Google Art & Culture) |
Scènes mythologiques et religieuses
Étienne Jeaurat. Achille partant pour venger la mort de Patrocle (v. 1738). Huile sur toile, 136 × 163 cm, musée des Beaux-arts, Cambrai. Achille et Patrocle sont deux guerriers de la guerre de Troie, conflit légendaire de la mythologie grecque. Ils entretiennent une amitié indéfectible et parfois présentée comme homosexuelle. Jeaurat représente Achille, en armure, devant le corps de Patrocle, tué au combat. Une muse lui indique les circonstances de la mort. |
Étienne Jeaurat. Le triomphe d’Amphitrite (1730-89). Huile sur toile, 99 × 131 cm, National Gallery of Ireland, Dublin. Dans la mythologie grecque, Amphitrite est une néréide, c’est-à-dire une nymphe marine, fille de Nérée de de Doris. Elle apparaît ici sur un monstre marin, adulée par ses suivantes. Une scène de triomphe consiste à mettre en valeur un personnage par une composition où il surplombe les autres figures qui lui rendent hommage. Le terme provient du triomphe des généraux romains vainqueurs, c’est-à-dire de leur entrée solennelle dans Rome. |
Étienne Jeaurat. Vénus et l'Amour, dit aussi Pomone (1730-89). Huile sur toile, 54,3 × 66 cm, musée du Louvre, Paris. Selon le titre, il peut s’agir de Vénus et de son fils Cupidon ou de Pomone et Vertumne. Vertumne, divinité des saisons et des arbres, a la capacité de changer d’apparence (comme les saisons !). Il tombe amoureux de Pomone, divinité des fruits et des jardins, d’une beauté exceptionnelle. Pomone n’a que faire de Vertumne. Celui-ci utilise donc son pouvoir de transformation pour conquérir la belle. Il y parvient et le couple devient immortel puisqu’il peut vieillir et rajeunir au gré des saisons. |
Aquarelles, dessins
Étienne Jeaurat. Paysage d'Italie avec deux personnages (1726). Aquarelle et gouache sur pierre noire sur papier vergé crème, 25,7 × 41,5 cm, Musée des Beaux-arts du Canada. Œuvre de jeunesse de l’artiste, peinte lors de son séjour en Italie. L’un des rares paysage de Jeaurat. |
Étienne Jeaurat. Jeune homme nu agenouillé (1730-36). Craie rouge, rehaussée de blanc, sur papier, 46,7 × 34,6 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. |
Étienne Jeaurat. Jeune fille couvrant les yeux d’un jeune homme (1730-89). Aquarelle et crie noire sur papier, 30 × 190 cm, Rijksmuseum, Amsterdam. |
Pour visionner d'autres œuvres sur GOOGLE ARTS & CULTURE, cliquer sur le nom du peintre :
Ajouter un commentaire