Fra Angelico
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Patrick AULNAS
Portrait
Luca Signorelli. Portrait posthume de Fra Angelico (v. 1501)
Détail d’une fresque de la cathédrale d’Orvieto.
Biographie
v. 1400-1455
On ne sait rien de la jeunesse de Guido di Piero (ou di Pietro), véritable nom de Fra Angelico. Sa date de naissance elle-même est incertaine. Georgio Vasari (*) la situait en 1387, mais les historiens penchent aujourd'hui pour l'extrême fin du 14e siècle : retenons donc 1400. Il est né près du château de Vicchio, dans le Mugello, vallée située à une trentaine de kilomètres de Florence. Pour les dix sept premières années de sa vie, il n'existe aucun document et on ignore donc qui étaient ses parents. Un document de 1417 mentionne déjà son activité de peintre. Fin 1417, il entre au couvent San Domenico de Fiesole appartenant à l'ordre des Dominicains où il sera rebaptisé Fra Giovanni (Frère Jean). Au cours de la période 1422-1426, il est très lié avec le prieur (supérieur de la communauté religieuse) du couvent, Antonino Pierozzi (1389-1459) qui devint par la suite archevêque de Florence puis sanctifié sous le nom de saint Antonin. Fra Giovanni est ordonné prêtre en 1427. Quant au surnom de Fra Angelico, on le trouve peu après sa mort dans certains documents, mais il n'est pas prouvé qu'il lui ait été attribué de son vivant.
Retable San Domenico ou Pala di Fiesole, détail (1423-24)
Analyse détaillée
Jusqu'à 1438, l'activité artistique de Fra Angelico est intense ; il peint un grand nombre de retables d'églises. Simultanément, en 1432 et 1433, il assume les responsabilités de vicaire au couvent San Domenico de Fiesole. En 1438, Fra Angelico quitte Fiesole pour s'installer à Florence. C'est en effet à cette date que commence la restauration des bâtiments du couvent San Marco de Florence sous l'impulsion et avec le financement de Cosme de Médicis (1389-1464), dit Cosme L'Ancien. Les travaux de rénovation sont dirigés par l'architecte Michelozzo (1396-1472) qui emprunte largement les conceptions architecturales de Brunelleschi (1377-1446). C'est dans cet ensemble architectural que Fra Angelico réalise l'un des plus émouvant cycles de fresques de l'histoire de l'art. Il y travaille longuement, certainement jusqu'à 1445 et peut-être jusqu'à 1450. Antonino Pierozzi, l'ancien prieur de Fiesole et ami de Fra Angelico, était devenu prieur de San Marco entre 1439 et 1444. Il joua un rôle important pour définir avec le peintre le programme de fresques à réaliser. Fra Angelico réalisera également le grand retable de l'église du couvent de San Marco.
En 1445, le pape Eugène IV (1383-1447) fait appel à Fra Angelico pour décorer la chapelle du Sacrement du Vatican. Selon Vasari, le pape aurait proposé au peintre la fonction d'archevêque de Florence mais il refusa et elle fut attribuée à Antonino Pierozzi (saint Antonin). Rien ne permet cependant de corroborer l'affirmation de Vasari. Fra Angelico poursuivra sa carrière artistique à Orvieto (fresques de la voûte de la cathédrale) puis au Vatican (fresques de la chapelle Nicoline). Il retourne au couvent de Fiesole pour occuper la charge de prieur de 1450 à 1452. Il revient à Rome en 1453-1454 et y meurt en 1455.
Œuvre
Vasari signale que Fra Angelico commence par la miniature :
« On voit de la main de Fra Giovanni dans son couvent de San Marco, à Florence, plusieurs livres de chœur ornés de miniatures si belles qu'on ne saurait imaginer mieux, et il en laissa de semblables à San Domenico da Fiesole, exécutées avec un soin incroyable. Il est vrai qu'il fut aidé dans ce travail par un frère, plus âgé que lui, qui était également miniaturiste et peintre très habile. » (*)
Outre les miniatures, son œuvre comporte surtout des retables et des fresques. La réalisation des cycles de fresques est un travail d'équipe sous la direction et l'inspiration de Fra Angelico.
Concernant l'art de Fra Angelico, l'interprétation de Vasari domina jusqu'au 19e siècle :
« Il avait pour coutume de ne jamais retoucher ou repasser ses peintures ; il les faisait telles qu'elles venaient du premier coup, croyant, disait-il, que telle était la volonté de Dieu. On assure qu'il n'aurait jamais touché à ses pinceaux sans s'être mis auparavant en oraison. Il ne représenta jamais le Sauveur sur la Croix sans que ses joues fussent baignées de larmes ; aussi reconnaît-on dans les visages et les attitudes de ses personnages la sincérité de sa foi dans la religion chrétienne. » (*)
Fresques de San Marco. L'Annonciation (1442-43)
Ainsi, l'œuvre venait d'un saint homme qui était l'intermédiaire de la divinité. Son travail reflétait nécessairement « la volonté de Dieu » et l'émotion artistique provenait de la foi chrétienne.
Bien évidemment, cette manière de voir a évolué aujourd'hui. La peinture de Fra Angelico n'est certes pas séparable du contexte religieux de l'époque et, pour le peintre, il s'agit bien d'une sorte de prédication par l'image. Mais son art constitue une transition entre le Moyen Âge et la Renaissance. Les architectures qu'il représente s'inspirent beaucoup de l'Antiquité, caractéristique de la Renaissance, mais il est très réticent en ce qui concerne la perspective. Masaccio ou Filippo Lippi, ses contemporains, ont beaucoup plus de hardiesse dans ce domaine. Les compositions de Fra Angelico conservent ainsi quelque chose du charme naïf du Gothique. Il innove cependant hardiment dans l'utilisation de la couleur et de la lumière. Il n'utilise pas le clair-obscur mais juxtapose des couleurs vives, provoquant ainsi des contrastes faisant jaillir la luminosité (Le couronnement de la Vierge, Musée du Louvre, 1434-35).
Les retables
La technique utilisée est la tempera sur bois. Voir notre page Panorama 15-16e siècles pour des détails techniques.
Retable San Domenico ou Pala di Fiesole (1423-24). Tempera et or sur bois, 212 × 237 cm, San Domenico, Fiesole. La plus ancienne peinture connue de Fra Angelico, retouchée en 1501 par Lorenzo di Credi. La Vierge portant l'enfant Jésus est entourée d'anges de petites tailles et de quatre saints. La taille représentée correspond au statut des personnages dans le dogme. Les quatre saints sont les fondateurs de l'ordre des Dominicains auquel appartenait le couvent de Fiesole : à gauche, saint Thomas d'Aquin et saint Barnabé ; à droite, saint Dominique et saint Pierre de Vérone.
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Retable San Domenico ou Pala di Fiesole, détail (1423-24). La Vierge et le Christ enfant restent encore imprégnés du style Gothique international. Fra Angelico a été l'élève de Lorenzo Monaco (1370-1424), l'un des principaux représentants de ce style en Italie. L'élégance un peu précieuse reste éloignée du réalisme qui caractérise la Renaissance |
Retable San Domenico ou Pala di Fiesole, prédelle (1423-24). Tempera et or sur bois, 32 × 244 cm, National Gallery, Londres. La prédelle est la partie inférieure du retable. Elle comporte ici cinq panneaux sur lesquels sont représentés 300 personnages (saints, anges, prophètes, etc.) avec au centre le Christ ressuscité. L'expérience de miniaturiste du peintre s'exprime ici, mais il est probable que seul le panneau central soit entièrement de la main de Fra Angelico.
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L'Annonciation (1430-32). Tempera sur bois, 194 × 194 cm, Musée du Prado, Madrid. Il s'agit de la partie centrale d'un retable exécuté pour le couvent San Domenico de Fiesole et actuellement conservé au musée du Prado à Madrid. Il est parfois appelé Retable du Prado. L'archange Gabriel annonce à la Vierge Marie la naissance prochaine du Christ (maternité divine de la Vierge selon le dogme chrétien). La partie inférieure (prédelle) comporte cinq panneaux décrivant la vie de la Vierge depuis sa naissance jusqu'à sa mort.
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L'Annonciation, détail (1430-32). Partie gauche du retable évoquant le paradis terrestre et l'épisode au cours duquel Adam et Eve en sont chassés.
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Le couronnement de la Vierge (v. 1434-35). Tempera sur bois, 213 × 211 cm, musée du Louvre, Paris. Episode de la tradition chrétienne selon lequel la Vierge est accueillie au paradis par le Christ qui pose sur sa tête une couronne. A la cérémonie céleste participent des anges musiciens et des saints. Fra Angelico s'est inspiré de Masaccio pour l'effet de perspective souligné par les marches et les dalles du carrelage au sol. La prédelle est consacrée à des scènes de la vie des fondateurs de l'ordre des Dominicains car ce retable était destiné au couvent San Domenico de Fiesole.
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Retable de San Marco (1438-40). Tempera sur bois, 220 × 227 cm, Museo di San Marco, Florence. Ou Pala di San Marco. Ce retable était destiné à l'église du couvent San Marco de Florence. Il est composé d'un panneau central (voir ci-après), de deux pilastres latéraux et d'une prédelle (partie inférieure). Les pilastres représentent huit saints (à gauche de haut en bas : Jourdain de Saxe, Bernard, Roch, Vincent Ferrier ; à droite de haut en bas : Thomas d'Aquin, Romuald, Jérôme de Stridon, Pierre de Vérone). La prédelle est consacrée à des épisodes de la vie de saint Côme (patron des chirurgiens) et de son frère saint Damien (patron des pharmaciens) tous deux martyrisés sous Dioclétien (4e siècle).
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Retable de San Marco, panneau central (1438-40). Ce panneau représente une Vierge à l'Enfant entourée de saints. Il s'agit du thème de la Conversation sacrée qui se développait à l'époque : les personnages représentés semblent engagés dans une conversation.
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Retable de San Marco, détail de la prédelle (1438-40). ). Tempera sur bois, 37 × 46 cm, National Gallery of Ireland, Dublin. Quatrième image de la prédelle. Côme et Damien sont condamnés au bûcher.
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Retable Santa Trinita ou Descente de croix (1437-40). Tempera sur bois, 176 × 185 cm, Museo di San Marco, Florence. Ce retable avait été commencé par Lorenzo Monaco (1370-1424) qui fut le maître de Fra Angelico. Celui-ci l'a terminé. Il avait été commandé pour l'église Santa Trinita de Florence. Les pilastres latéraux représentent divers saints et les pinacles (parties supérieures triangulaires) des épisodes de la vie du Christ.
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Retable Santa Trinita ou Descente de croix, panneau central (1437-40). Scène récurrente dans l'art occidental. Le Christ est mort sur le croix et des personnages saints le descendent avant sa mise au tombeau. Marie-Madeleine tient les pieds du Christ. L'arrière-plan paysager provient de l'imagination du peintre et ne prétend pas au réalisme.
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Les fresques
Fresques du couvent San Marco de Florence
Elles figurent parmi les plus belles fresques jamais peintes, probablement parce que Fra Angelico a su transmettre à ce moment de sa vie la quintessence même de son être. Ces scènes bien connues de la tradition chrétienne baignent dans une ambiance d'humilité, de paix, de douceur, d'extrême délicatesse, et constituent, même pour les non-croyants, une formidable leçon d'humanité.
Vue du couvent San Marco de Florence
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Fresques de San Marco. La nativité (1440-41). Fresque, 193 × 164 cm, Couvent San Marco, Florence. Episode biblique de la naissance de Jésus-Christ. Marie (mère), Joseph (époux de Marie) et quelques personnages saints ainsi que des anges sont en général représentés.
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Fresques de San Marco. Lamentation sur le Christ mort (1440-41). Fresque, 184 × 152 cm, Couvent San Marco, Florence. Thème récurrent de la peinture occidentale appelé aussi Déploration du Christ. Le Christ est mort, allongé, et des personnages le pleurent. Mantegna (1431-1506), Botticelli (1444-1510), Spada (1576-1622) peindront également une telle lamentation.
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Fresques de San Marco. Noli Me Tangere (1440-41). Fresque, 166 × 125 cm, Couvent San Marco, Florence. Noli me tangere (« Ne me touche pas ») sont les paroles prononcées par Jésus-Christ ressuscité, le dimanche de Pâques, à l'adresse de Marie-Madeleine.
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Fresques de San Marco. L'Annonciation (1442-43). Fresque, 230 × 321 cm, Couvent San Marco, Florence. L'archange Gabriel annonce à la Vierge Marie la naissance prochaine du Christ (maternité divine de la Vierge selon le dogme chrétien). Le thème a été traité plusieurs fois par Fra Angelico (voir ci-dessus l'Annonciation de 1430-32).
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Fresques de San Marco. Conversation sacrée (v. 1443). Fresque, 195 × 273 cm, Couvent San Marco, Florence. La Vierge avec l'Enfant Jésus est entourée de personnages de saints qui semblent bavarder entre eux. Les personnages représentés ne sont pas des contemporains. Le donateur ou le commanditaire est parfois représenté. Ce thème apparaît au 15e siècle.
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Les fresques de la chapelle Nicoline au Vatican
Le pape Eugène IV (1383-1447) avait déjà fait appel à Fra Angelico pour peindre des fresques au Vatican, mais c'est pour le pape Nicolas V (1398-1455) qu'il réalisera les fresques de la chapelle Nicoline de 1447 à 1449 environ. Ces dernières sont consacrées à des épisodes de la vie des deux premiers martyrs du christianisme : saint Etienne (lapidé) et saint Laurent (condamné au supplice du gril).
Fresques de la chapelle Nicoline. Ordination de saint Laurent (1447-49). Fresque, 271 × 197 cm, Chapelle Nicoline, Vatican.
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Fresques de la chapelle Nicoline. Le martyr de saint Laurent (1447-49). Fresque, 271 × 236 cm, Chapelle Nicoline, Vatican.
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Fra Angelico. Fresques de la chapelle Nicoline. Saint Etienne faisant l'aumône (1447-49). Fresque, Chapelle Nicoline, Vatican.
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Fra Angelico. Fresques de la chapelle Nicoline. La lapidation de saint Etienne (1447-49). Fresque, 326 × 236 cm, Chapelle Nicoline, Vatican.
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L'armadio degli Argenti (Armoire des vases sacrés ou Armoire des ex-voto d'Argent)
Il est probable que les panneaux formant les portes et les volets de cette armoire ont été commandés par Pierre 1er de Médicis (1416-1469). Ils sont décorés de nombreuses scènes d'une taille de 38,5 × 37 cm consacrées à des épisodes de la vie du Christ. Neuf scènes sont attribuées avec certitude à Fra Angelico et forment le panneau de la jeunesse du Christ (123 × 123 cm). Les autres scènes ont été peintes par des artistes plus jeunes. Cette armoire était à l'origine destinée à la Basilique della Santissima Annunziata de Florence et devait être portée pendant les processions. Les panneaux sont actuellement conservés au musée San Marco de Florence.
L'armadio degli Argenti, panneau de la jeunesse du Christ (1451-52). Tempera sur bois, 123 × 123 cm, Museo di San Marco, Florence.
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Panneau de la jeunesse du Christ, la fuite en Egypte (1451-52). Tempera sur bois, 38,5 × 37 cm, Museo di San Marco, Florence. Le roi Hérode Ier de Palestine, ayant appris la naissance à Bethléem du roi des Juifs, donne l'ordre de tuer tous les enfants de moins de deux ans se trouvant dans la ville. Joseph, prévenu par un songe, s'enfuit avec l'Enfant Jésus et sa mère Marie en Égypte où ils resteront jusqu'à la mort d'Hérode.
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Panneau de la jeunesse du Christ, l'Annonciation (1451-52). Tempera sur bois, 38,5 × 37 cm, Museo di San Marco, Florence. L'archange Gabriel annonce à la Vierge Marie la naissance prochaine du Christ (maternité divine de la Vierge selon le dogme chrétien). Le thème été traité plusieurs fois Par Fra Angelico (voir ci-dessus l'Annonciation de 1430-32 et celle de 1442-43).
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Panneau de la jeunesse du Christ, le massacre des Innocents (1451-52). Tempera sur bois, 38,5 × 37 cm, Museo di San Marco, Florence. Le roi Hérode Ier de Palestine, ayant appris la naissance à Bethléem du roi des Juifs, donne l'ordre de tuer tous les enfants de moins de deux ans se trouvant dans la ville. Les chrétiens considèrent ces enfants comme des martyrs et les qualifient de Saints Innocents.
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Les miniatures
Elles sont issues du Missel 558 qui est un livre regroupant des chants religieux pour la messe. Il comprend 261 folios dont 36 sont décorés de miniatures ayant pour auteur Fra Angelico et un autre artiste qui l'assistait au couvent San Domenico de Fiesole. La dimension maximum est de 47,5 × 35 cm.
Vierge de la Miséricorde avec frères agenouillés (1424). Tempera et or sur parchemin, 47,5 × 35 cm, Museo di San Marco, Florence.
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La conversion de saint Paul (1424-30). Tempera et or sur parchemin, 47,5 × 35 cm, Museo di San Marco, Florence.
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Saint Dominique en gloire (1424-30). Tempera et or sur parchemin, 47,5 × 35 cm, Museo di San Marco, Florence. |
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(*) Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes (édition 1555)
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