Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita (v. 1408)

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Patrick AULNAS

Gentile da Fabriano (v. 1370-1427) figure parmi les plus grands artistes du tout début du 15e siècle. Le Polyptyque de Valle Romita est un bon exemple de ce qu’appréciait l’aristocratie de l’époque.

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita (v. 1408)

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita (v. 1408)
Tempera et or sur bois, 280 × 250 cm, Pinacoteca di Brera, Milan.
Image HD sur PINACOTECA DI BRERA

 

Contexte historique

Ce polyptyque peut être considéré comme l’un des sommets du style gothique international, qui domine la création artistique dans la seconde moitié du 14e siècle et au début du 15e. Cette terminologie, créée par les historiens, vaut ce qu’elle vaut. Elle signifie qu’une certaine unification stylistique apparaît dans l’Europe de l’Ouest, sous l’impulsion des grands aristocrates qui dominent totalement la vie politique et déterminent par leurs commandes les orientations culturelles. Ce style courtois (apprécié dans les cours de la noblesse) associe élégance des figures et luminosité de la composition.

Selon les hypothèses des spécialistes, le commanditaire du Polyptyque de Valle Romita pourrait être Chiavello Chiavelli, seigneur de Fabriano, la localité dont l’artiste est originaire. Chiavello Chiavelli avait choisi comme lieu de sépulture l’ermitage Santa Maria di Valdisasso, à proximité de Fabriano, et l’avait fait restaurer à partir de 1406. Le polyptyque avait été commandé pour décorer cet ermitage. La région des Marches est désormais propriétaire du bâtiment de l’ermitage, qui a été restauré récemment et a retrouvé tout son éclat.

 

L’Ermitage de Santa Maria di Valdissasso

L’Ermitage de Santa Maria di Valdissasso

 

Une copie du Polyptyque de Valle Romita a été placée dans l’église de l’ermitage.

 

Copie du Polyptyque de Valle Romita. Ermitage di Valdissasso.

Copie du Polyptyque de Valle Romita. Ermitage di Valdissasso

 

Le polyptyque lui-même a été conservé à la pinacothèque de Brera à partir de 1811. Il a dû être reconstitué par achat de certains éléments à une collection privée. L’appellation Polyptyque de Valle Romita provient de la vallée où se situe l’ermitage.

 

Analyse de l’œuvre

Les caractéristiques générales de l’architecture gothique apparaissent dans la structure du polyptyque : ensemble très élancé, arc en ogives sur les panneaux latéraux, colonnettes torsadées très minces séparant les panneaux. Le fond or couvrant une grande partie de la superficie illumine puissamment la composition et place les figures dans un véritable écrin. Le polyptyque est composé de cinq compartiments à double registre avec un panneau central consacré au Couronnement de la Vierge et des panneaux latéraux représentent des saints.

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Les neuf scènes.

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Les neuf scènes

 

Le Couronnement de la Vierge, au centre, est un épisode de la tradition chrétienne au cours duquel la Vierge est accueillie au paradis par le Christ qui pose sur sa tête une couronne. A la cérémonie céleste participent des anges musiciens et des saints. La scène se déroulant au paradis, le ciel est en bas (en bleu) et des anges musiciens ont été placés au-dessus. Au sommet, Dieu le Père porte une couronne royale. La colombe placée entre le Christ et la Vierge représente le Saint Esprit, de façon à faire apparaître la Sainte Trinité (le Père, le Fils et le Saint Esprit).

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Le martyr de saint Pierre.

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Le martyr de saint Pierre


Sur les panneaux latéraux, l’artiste a placé des saints debout sur des prairies fleuries. Quatre saints figurent sur la partie inférieure : de gauche à droite, saint Jérôme, saint François d’Assise, saint Dominique et sainte Madeleine. Sur la partie supérieure, quatre scènes de la tradition chrétienne ont été représentées : le martyr de Pierre de Vérone, saint Jean-Baptiste dans le désert, saint François recevant les stigmates et peut-être saint Antoine de Padoue lisant.

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Le Christ accueille la Vierge.

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Le Christ accueille la Vierge


​Une caractéristique du gothique international consiste à traiter les personnages sacrés comme des figures élégantes, somptueusement vêtues selon la mode en vigueur dans les cours de l'époque. Les plis des vêtements sont représentés par des traits gracieux correspondant à l'idéal esthétique du début du 15e siècle.

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. La Vierge.

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. La Vierge

 

Des figures du gothique international émanent une parfaite courtoisie et une élégance maniériste. Cette Vierge au visage très doux et aux longues mains repliées sur la poitrine reflète à la fois la spiritualité et l’idéal courtisan de l’élite aristocratique.

 

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita, détail. Fleurs et les feuilles.

Gentile da Fabriano. Polyptyque de Valle Romita. Fleurs et les feuilles

 

Le réalisme botanique de la végétation caractérise le gothique international. Les fleurs et les feuilles sont traitées avec une extrême précision.

 

Autres compositions sur le même thème aux 14e et 15e siècles

Le thème du Couronnement de la Vierge donne naissance à de grands retables aux 14e et 15e siècles. Il continuera à être utilisé ensuite, mais sous forme de tableaux de moindre taille.

 

Bartolo di Fredi. Polyptyque du Couronnement de la Vierge (1388)

Bartolo di Fredi. Polyptyque du Couronnement de la Vierge (1388). Tempera sur bois, 332 × 279 cm, Museo Civico e Diocesano d’Arte Sacra, Montalcino. Achevé en 1388, ce polyptyque a été commandé en 1383 par la Compagnia di San Pietro (Confrérie des cordonniers) pour l’autel de la chapelle de l’Annonciation, à l’intérieur de l’église de San Francesco à Montalcino. Les différents panneaux relatent des épisodes de la vie de la Vierge. Les deux colonnes latérales sont consacrées à la représentation de saints bénéficiant d’une dévotion particulière dans la région de Sienne.

Lorenzo Monaco. Le couronnement de la Vierge (1414)

Lorenzo Monaco. Le couronnement de la Vierge (1414). Tempera et or sur bois, 450 × 350 cm, Galerie des Offices, Florence. Ce polyptyque est considéré comme l’un des chefs-d'œuvre italiens du style gothique international. Le cadre en bois doré, presque entièrement reconstruit, détermine l'espace où s'insèrent les images. Le panneau central semble formé de trois parties en raison des trois cuspides qui le composent. En réalité, il s’agit d’une seule pièce de bois. La scène centrale se situe au paradis, symbolisé par le fond doré et les bandes bleues étoilées du premier plan. La prédelle (partie basse) illustre la vie de saint Benoît (fondateur de l’Ordre des Bénédictins dont les Camaldules ont adopté la règle) et celle de saint Bernard de Clairvaux.

Image HD sur GOOGLE ARTS & CULTURE
Visite virtuelle : Le couronnement de la Vierge à la Galerie des Offices avec Google arts & culture

Analyse détaillée

Fra Angelico. Le couronnement de la Vierge (v. 1434-35)

Fra Angelico. Le couronnement de la Vierge (v. 1434-35). Tempera sur bois, 213 × 211 cm, musée du Louvre, Paris. Fra Angelico s'est inspiré de Masaccio pour l'effet de perspective souligné par les marches et les dalles du carrelage au sol. La prédelle est consacrée à des scènes de la vie des fondateurs de l'ordre des Dominicains car ce retable était destiné au couvent San Domenico de Fiesole.

Quarton. Le Couronnement de la Vierge (1454)

Enguerrand Quarton. Le Couronnement de la Vierge (1454). Huile sur bois, 183 × 220 cm, Musée Pierre du Luxembourg, Villeneuve-lès-Avignon. Ce retable a été commandé par Jean de Montagnac pour la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon. L'acte juridique établissant le contrat est très précis et comporte 26 articles détaillant ce que doit représenter le peintre. Par exemple, l'article 1er stipule : « Premièrement, doit figurer le paradis et dans ce paradis on doit voir la Sainte Trinité, sans aucune différence entre le Père et le Fils ; le Saint-Esprit doit avoir la forme d'une colombe avec notre dame devant, placé comme il semblera préférable à maître Enguerrand... ».

 

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