Angelica Kauffmann. Ferdinand IV de Naples et sa famille (1783)
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Patrick AULNAS
C’est par l’art du portrait qu’Angelica Kauffmann conquiert une réputation internationale. Elle peint toute l’aristocratie européenne et obtient en Angleterre un immense succès, ses portraits s’arrachant pour des sommes importantes. Venant de Londres, elle séjourne à Naples en 1781-1782 et réalise le portrait de la famille royale du lieu.
Angelica Kauffmann. Ferdinand IV de Naples et sa famille (1783)
Huile sur toile, 310 × 426 cm, Museo di Capodimonte, Naples.
Contexte historique
Ferdinand IV de Naples (1751-1825) fait partie de cette aristocratie finissante qui gouvernait l’Europe jusqu’au 19e siècle. Aux temps troublés de la Révolution française et de l’Empire napoléonien, il fut, sous trois noms différents, roi de petits territoires situés en Italie. Il est le fils de Charles III (1716-1788), roi d’Espagne, préalablement roi de Naples et de Sicile sous le nom de Charles VII de Naples. Sa mère, Marie-Amélie de Saxe (1724-1760) est la fille du roi de Pologne. Lorsque son père devient roi d’Espagne en 1759, il renonce à la royauté napolitaine et sicilienne. Son fils puiné Ferdinand lui succède.
C’est ainsi que le petit Ferdinand, âgé de huit ans, devient Ferdinand IV, roi de Naples, mais également Ferdinand III, roi de Sicile. Confronté aux révolutionnaires français puis à Napoléon, il perdra Naples au profit de Joseph, frère de Napoléon 1er, puis de Murat, désignés successivement rois de Naples par l’empereur. Il retrouve ses territoires après la chute de Napoléon et gouverne à nouveau Naples et la Sicile sous le nom de Ferdinand 1er. Mécène, il fonde le musée archéologique de Naples où sont exposés les objets découverts à Pompéi et Herculanum.
Ferdinand IV de Naples, Ferdinand III de Sicile et Ferdinand 1er de Naples et de Sicile ne sont donc qu’un seul et même individu. Angelica Kauffmann peint la famille de Ferdinand avant la Révolution française, en 1782-1783. Le roi a alors 31 ans.
Analyse de l’œuvre
La famille royale est alignée devant un décor paysager comportant un élément architectural sur lequel s’appuie le roi Ferdinand. De gauche à droite, les personnages suivants ont été représentés.
Marie-Thérèse de Bourbon-Naples (1772-1807) jouant de la harpe. |
François 1er des Deux-Siciles (1777-1830) caressant un chien. |
Le roi Ferdinand IV de Naples, debout. |
La reine Marie-Caroline d’Autriche (1752-1814), |
Marie-Christine de Bourbon-Siciles (1779-1849) |
Louise et Marie-Amélie de Bourbon-Siciles |
Gennaro de Naples et Sicile (1780-1789), décédé de la variole. |
Ferdinand et Marie-Caroline auront 17 enfants ! Seuls apparaissent les premiers de la fratrie, nés avant 1783.
Ce type de portrait de groupe, d’inspiration anglaise, est une pure convention artistique. Une famille unie pose devant un paysage reconstitué, censé représenter la campagne de la région, la Campanie. À l’exception des très jeunes enfants, tous les personnages fixent le spectateur afin d’instaurer un dialogue visuel et de marquer l’artifice pictural, c’est-à-dire la pose. Trois chiens et quelques accessoires, une harpe et un berceau de promenade sur roues, évoquent l’intimité familiale. Le socle de pierre sur lequel trône un grand vase est une constante du paysage classique ou néoclassique.
La réussite chromatique est incontestable. Le groupe familial, mis en évidence par des couleurs claires, apparaît en pleine lumière sur un arrière-plan paysager brumeux et une végétation vaporeuse vert foncé. Au centre, les tenues entièrement blanches de la reine Marie-Caroline et de sa fille éclairent l’espace pictural. Cette luminosité est accentuée par les couleurs jaune, rouge et rose des vêtements des autres figures encadrant la reine.
Ce portrait néoclassique de plus de quatre mètres de largeur constitue une prouesse par sa monumentalité. Il y peu d’exemples, sinon aucun, de femmes ayant peint un tel tableau à cette époque ou auparavant. L’œuvre fut reçue avec enthousiasme et chantée en vers par le poète italien Ippolito Pindemonte (1753-1828). Outre ses qualités artistiques, le tableau constitue une illustration de l’image que souhaitait laisser d’elle-même l’aristocratie régnante à la fin de sa domination historique de plusieurs siècles. Les Lumières bouleversaient déjà intellectuellement le statu quo. Ferdinand IV de Naples en connaîtra personnellement les conséquences.
Quelques scènes de groupe à caractère monumental
Si l’on écarte la fresque, les réalisations gigantesques étaient, à la Renaissance, des polyptyques à caractère religieux. Ces polyptyques sur bois comportaient plusieurs éléments assemblés. Les tableaux sur toile peuvent dépasser les quatre mètres. Jacques-Louis David atteint presque une largeur de dix mètres avec le sacre de Napoléon 1er.
Jan Van Eyck. Le retable de L'Adoration de l'Agneau mystique, ouvert (1432). Huile sur bois, 350 × 461 cm, Cathédrale Saint-Bavon, Gand. Ce polyptyque comprend 24 panneaux. Il a été commencé par Hubert Van Eyck et terminé par son frère Jan après la mort d'Hubert. La partie supérieure représente le Christ-Roi assis entre la Vierge Marie et saint Jean-Baptiste. À droite et à gauche de ces trois personnages, des anges chantent et jouent de la musique. Les deux panneaux extérieurs représentent Adam et Ève. La partie inférieure est consacrée à l'adoration de l'Agneau de Dieu, par plusieurs groupes de personnes priant. |
Frans Hals. Cortège des officiers et des sous-officiers du corps des archers de Saint-Georges (1639). Huile sur toile, 218 × 421 cm, Frans Halsmuseum, Haarlem. Les corps des archers et des arbalétriers étaient des milices civiles jouissant d'un grand prestige. Il fallait appartenir aux grandes familles locales pour les intégrer. Ces milices symbolisaient la liberté des villes et leurs membres étaient fiers d'être représentés sur un tableau en tenue d'apparat, parfois même avec armes, comme ci-contre. Le deuxième personnage tout en haut en partant de la gauche est Frans Hals lui-même, qui faisait partie du corps en tant que peintre célèbre, mais pas au rang d'officier. |
Diego Vélasquez. Les Ménines (1656-57). Huile sur toile, 318 × 276 cm, musée du Prado, Madrid. Las Meninas ou les demoiselles d’honneur. Au centre, l’infante Margarita d’Espagne est entourée de ses deux demoiselles d’honneur et d’une naine. Mais le tableau est surtout un jeu entre le regard du spectateur et celui du peintre. A gauche, Vélasquez s’est représenté lui-même en train de peindre le roi Philippe IV et la reine Marie-Anne d'Autriche, seconde épouse du roi, qui occupent donc la place du spectateur. Le roi et la reine apparaissent en effet dans le miroir situé derrière le peintre en arrière-plan. Au fond, dans l’embrasure de la porte, se dessine la silhouette du chambellan de la reine. Cette composition d’une grande complexité est également une étude sur la lumière directe et réfléchie.
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Jacques-Louis David. Le sacre de Napoléon (1808). Huile sur toile, 629 × 979 cm, musée du Louvre, Paris. Tableau gigantesque représentant le sacre de l'empereur Napoléon et le couronnement de l'impératrice Joséphine, à Notre-Dame de Paris, le 2 décembre 1804. « Pour l'ordonnancement général, David s'est inspiré du Couronnement de Marie de Médicis de Rubens (au Louvre). Il a étudié la cérémonie sur place et a fait poser la plupart des participants. Dans l'atelier aménagé à cet effet, il recompose la scène à l'aide de maquettes en carton et de figurines en cire. Le peintre distingue les personnages essentiels en les plaçant au centre et en les éclairant d'un faisceau de lumière. Ainsi l'arcade forme autour du couple impérial un cadre solennel et la foule les entoure, tel un écrin scintillant. » (Notice musée du Louvre) |
Gustave Courbet. L'Atelier du Peintre (1854-55). Huile sur toile, 359 × 598 cm, Musée d'Orsay, Paris. Intitulé complet : L’Atelier du peintre, allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique. Les dimensions du tableau et la représentation à la fois réaliste et allégorique de l’atelier ont pour objectif de tourner en dérision les préceptes de l’académisme. Au centre de la composition se trouve Courbet lui-même peignant. Il est entouré d’un modèle dénudé, d’un enfant et d’un chat. La partie gauche évoque la réalité sociale : on y trouve des représentants de toutes les catégories, riches ou pauvres. A droite figurent les amis de Courbet, en particulier Proudhon et Baudelaire. Le tableau fut refusé par le jury du Salon de 1855 alors que plusieurs autres tableaux de Courbet étaient acceptés. Il marque une rupture dans le style de Courbet qui était jusqu’alors romantique. |
Frédéric Bazille. Réunion de famille (1867). Huile sur toile, 152 × 230 cm, Musée d’Orsay, Paris. « Frédéric Bazille est très proche de Renoir et de Monet, chez qui il admire tout particulièrement les scènes de plein air. Profitant d'un séjour estival dans la résidence familiale de Méric, près de Montpellier, il s'attaque à ce motif dans une toile d'assez grand format, en réunissant sur une terrasse dix de ses parents proches, ainsi que lui-même représenté debout, à l'extrême gauche du tableau. » (Commentaire musée d’Orsay) |
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