Le paysage au Moyen Âge
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Patrick AULNAS
2. L'art du paysage au Moyen Âge
Le paysage n'est pas encore un art en soi au Moyen Âge (5e au 14e siècle). Il apparaît essentiellement dans les scènes religieuses et pour glorifier le pouvoir des rois et des nobles sur leur territoire. Dans les scènes religieuses, l'influence byzantine prédomine pendant de nombreux siècles : elles sont présentées, sauf exception, sur un fond doré. Il faut attendre les primitifs italiens, à partir du 13e siècle, pour que se développe la généralisation du paysage comme arrière-plan. La glorification du pouvoir politique constitue un autre thème permettant d'utiliser le paysage. Le pouvoir sur le territoire est représenté sous forme de tapisseries, de mosaïques ou de fresques destinées à orner les murs des palais.
Le paysage, arrière-plan des épisodes bibliques
Giotto. Joachim parmi les bergers (1304-06)
Fresque, Chapelle Scrovegni, Padoue.
La transition entre l'Antiquité et le Moyen Âge est marquée par l'évolution de la thématique. La religion chrétienne impose progressivement des représentations d'épisodes de l'histoire sainte : récits bibliques, légendes de saints par exemple. Le réalisme n'est pas considéré comme souhaitable, qu'il s'agisse des personnages ou du paysage. L'artiste cherche à évoquer la religion par des images afin de la mettre à la portée de tous. La représentation doit rester symbolique. La nature étant l'œuvre de Dieu, il n'est pas admissible de tenter de la recréer en image car l'homme ne peut pas avoir la prétention d'égaler la divinité. Lorsque, au 16e siècle, les peintres parviendront à un réalisme très convaincant, les commentateurs comme Giorgio Vasari (*) les compareront à des dieux vivants. Mais le Moyen âge exclut totalement cette ambition.
Les premiers temps du christianisme
Des premiers temps du christianisme, il reste surtout des mosaïques, dont celle dite du Bon Pasteur qui comporte des éléments de paysage.
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Les primitifs italiens
L'œuvre de Giotto di Bondone (v. 1267-1337) marque une évolution vers davantage de réalisme. Mais ce réalisme concerne surtout l'humanisation des personnages (le Christ, la Vierge, les saints) qui s'éloignent de la tradition byzantine pour exprimer des émotions. Le paysage, en arrière-plan de la scène religieuse, reste traditionnel. Il remplace les fonds dorés de la peinture des siècles précédents mais demeure schématique. La beauté du paysage n'est pas le propos du peintre. Il s'agit simplement de placer un épisode religieux sur une scène. Le paysage ressemble ainsi à un décor de théâtre, évocateur de la nature, mais réalisé par assemblage d'éléments stéréotypés (ciel, rochers, arbres, source, etc.).
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Le paysage, symbole de pouvoir
Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne (1337-39)
Fresque, Palazzo pubblico, Sienne.
Au Moyen Âge, en Europe, l'organisation politique est constituée d'une hiérarchie de fiefs. Des liens de vassalité unissent les nobles titulaires de ces fiefs. Les guerres sont fréquentes et l'appropriation du territoire constitue une motivation importante, d'autant que toute l'économie repose sur l'agriculture. Les conquêtes sont l'occasion de célébrations festives, mais aussi de créations artistiques. Le vainqueur souhaite parfois immortaliser sa victoire par de vastes fresques décorant son palais. Le paysage représente alors le territoire conquis. Des personnages y figurent symboliquement pour manifester les droits du seigneur sur son territoire : possession de serfs cultivant la terre, droit de chasse, etc.
La tapisserie de la reine Mathilde, Bayeux (1066-1082)
La tapisserie est très appréciée au Moyen Âge et les palais pouvaient en être garnis. Valentine d'Orléans, née Valentine Visconti (1366-1408), avait entièrement décoré sa chambre de tapisseries figurant des scènes rurales et bucoliques. Ces tapisseries ont été perdues. La plus célèbre des tapisseries ayant survécu est celle de la reine Mathilde, encore appelée Tapisserie de Bayeux, lieu de sa conservation. Il s'agit en réalité d'une broderie de fils de laine sur toile de lin d'environ 70 mètres de long (neuf panneaux) sur 0,5 mètre de large. Elle représente la conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant (1027-1087). La bataille d'Hastings (14 octobre 1066) opposant Guillaume à Harold Godwinson (1022-1066), le dernier roi saxon d'Angleterre, est particulièrement illustrée. La tapisserie a été confectionnée entre 1066 et 1082 afin d'être exposée dans la cathédrale de Bayeux. Il s'agit de raconter à la population les exploits de leur souverain Guillaume de Normandie. Le point de vue est donc celui des normands pour lesquels l'invasion de l'Angleterre était légitime.
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La mosaïque de la chambre du roi normand Roger, Palerme (v. 1160)
En 1061, les normands commandés par Roger de Hauteville (v. 1031-1101) ont conquis le Sicile et y ont installé une royauté. Le Palazzo Reale de Palerme fut alors construit pour proclamer la souveraineté normande sur l'île. Les appartements du roi ont reçu une somptueuse décoration de mosaïques.
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La victoire de Guidoriccio da Fogliano, Sienne (v. 1328)
Guidoriccio da Fogliano (1290-1352) est un condottiere italien. En 1328, combattant pour la République de Sienne, il s'empare de la Rocca de Montemassi, sur la commune de Roccastrada. La victoire fut fêtée à Sienne le 1er septembre 1328 et une grande fresque la célébrant fut commandée à Simone Martini (1284-1344). Le titre complet de l'œuvre, Guidoriccio da Fogliano all'assedio di Montemassi, renvoie à l'exploit militaire.
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Les fresques des effets du bon et du mauvais gouvernement, Sienne (1337-1339)
En 1337, la République de Sienne commande à Ambrogio Lorenzetti (1290-1348) un ensemble de fresques ayant pour thème les effets du bon et du mauvais gouvernement et devant orner la Sala dei Nove (la salle des Neuf) du Palazzo Pubblico de Sienne. Dans cette salle se réunissaient les neuf citoyens qui gouvernaient la République. Les fresques sont exécutées entre 1337 et 1339 et comportent plusieurs tableaux ayant pour thème successifs les effets du gouvernement sur la ville et la campagne, selon qu'il soit bon ou mauvais. Cette thématique offre l'occasion de peindre des paysages avec une approche morale.
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La chambre du Cerf du palais des papes à Avignon (v. 1340-1350)
Simone Martini (1284-1344) est un peintre siennois qui connut une célébrité internationale au 14e siècle. De 1309 à 1378, les papes quittent Rome et s'installent à Avignon. Simone Martini est appelé par le pape à travailler dans cette ville à partir de 1335 environ. La décoration murale de la chambre dite du Cerf du palais des Papes d'Avignon n'a cependant pas été réalisée par lui mais par un maître non identifié de son entourage. Il pourrait s'agir de Matteo Giovannetti (1322-1368) qui, à la mort de Simone Martini, se verra confier la responsabilité de la décoration du palais.
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Pour visionner d'autres œuvres sur GOOGLE ARTS & CULTURE, cliquer sur le nom du peintre :
Simone Martini. Guidoriccio da Fogliano
Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la ville
Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne
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(*) Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes (première édition 1550, remaniée en 1568, traduction Leclanché, 1841)
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