Vincent van Gogh
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Patrick AULNAS
Portraits et autoportraits
John Peter Russell. Portrait de Vincent van Gogh (1886)
Huile sur toile, 60 × 45,6 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Vincent van Gogh. Autoportrait à la pipe (1886)
Huile sur toile, 46 × 38 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Vincent van Gogh. Autoportrait avec chapeau de paille (1887)
Huile sur toile, 36 × 27 cm, Institute of Arts, Detroit.
Paul Gauguin. Van Gogh peignant des tournesols (1888)
Huile sur toile, 73 × 91 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Vincent van Gogh. Autoportrait au chapeau de feutre gris (1888)
Huile sur toile, 44 × 38 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Vincent van Gogh. Autoportrait à l’oreille bandée (1889)
Huile sur toile, 60 × 49 cm, Courtauld Gallery, Londres
Vincent van Gogh. Autoportrait (1889)
Huile sur toile, 65 × 54 cm, musée d’Orsay, Paris.
Biographie
1853-1890
Enfance et apprentissage commercial (1853-1873)
Vincent van Gogh est né le 30 mars 1853 à Groot-Zundert, près de la ville de Breda, aux Pays-Bas. La famille Van Gogh comporte des pasteurs protestants et des marchands d’art. Le père de Vincent, Théodore, est pasteur, mais un de ses oncles, Hendrik Vincent van Gogh, est marchand d’art à Bruxelles. Un autre oncle, portant également le nom de Vincent van Gogh, est associé à l'éditeur d'art parisien Goupil & Cie. Théodore et sa femme Anna Cornelia auront six enfants, dont l’un, Théodore (dit Théo, 1857-1891), jouera un rôle essentiel dans la vie du peintre.
En 1860, le jeune Vincent est d’abord scolarisé à l’école du village de Grot-Zundert, puis dans un internat à Zevenbergen et enfin au collège Guillaume II de Tilburg à partir de 1866. Il quitte précipitamment ce collège en 1868 pour revenir chez ses parents. Ceux-ci le placent alors en apprentissage à La Haye chez Goupil & Cie, filiale de l’entreprise parisienne, qui commercialise des dessins et reproductions artistiques. A la fin de son apprentissage, qui se déroule bien, Vincent van Gogh est embauché dans l’entreprise.
L’engouement pour la religion (1873-1880)
Il exercera ses fonctions d’abord à Londres en 1873-74, puis à Paris à partir de 1875. A Londres, une aventure amoureuse malheureuse le conduit à s’isoler de plus en plus et à se tourner vers la religion. Ne donnant plus satisfaction à ses employeurs, Van Gogh est congédié le 1er avril 1876.
Le futur peintre va alors mener une vie irrégulière, mais avec l’ambition constante de devenir pasteur. Il retourne d’abord en Angleterre où il sera employé comme professeur suppléant dans un internat, puis comme assistant dans une église méthodiste. De retour aux Pays-Bas fin 1876, il travaille dans une librairie, ce qui ne lui convient pas. Il étudie alors la théologie avec un de ses oncles, mais échoue aux examens d’entrée à l’université.
En 1878, Il devient prédicateur évangéliste laïc auprès des mineurs de charbon du Borinage, près de Mons, en Belgique. Il s’engage alors totalement aux côtés de ces ouvriers, se logeant aussi pauvrement qu’eux, descendant dans la mine et sauvant même un mineur à l’occasion d’un coup de grisou. Son engagement le fait apparaître davantage comme un meneur politique que comme un assistant du clergé. Il doit renoncer à sa mission auprès des mineurs. S’ouvre alors, en 1879-80, une période de désœuvrement qui conduira à un conflit entre Vincent van Gogh et son père.
Vincent van Gogh. Presbytère et église à Etten (1876)
Crayon et encre sur papier, 18 × 9,5 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
La formation artistique à Bruxelles et aux Pays-Bas (1880-1886)
Au cours de toutes ces années, Vincent van Gogh a beaucoup dessiné sans avoir de véritable formation. En novembre 1880, il s’inscrit à l’Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles et travaille également dans l’atelier du peintre Anthon van Rappard (1859-1892). Après un séjour de plusieurs mois chez ses parents fin 1881, il s’installe à La Haye où il reçoit les leçons du peintre Anton Mauve (1838-1888), son cousin par alliance : étude de la perspective et peinture à l’aquarelle d’abord, puis peinture à l’huile. Vincent van Gogh travaille, lit, apprend beaucoup à La Haye. Il envoie ses tableaux et ses dessins à son frère Théo qui travaille désormais à Paris pour Goupil & Cie et verse une pension à son frère. Mais Théo ne trouve pas le travail de Vincent assez abouti et celui-ci détruit de nombreuses créations.
Vincent van Gogh. Parterres de fleurs en Hollande (avr. 1883)
Huile sur toile sur bois, 49 × 66 cm, National Gallery of Art, Washington.
De septembre à décembre 1883, Van Gogh vit seul à Drenthe, dans le nord des Pays-Bas. Il se consacre totalement à sa peinture qui est axée sur des scènes paysannes ou artisanales (tissage), des portraits de paysans et des paysages. Il rejoint ensuite ses parents qui vivent désormais à Nuenen. Il dispose d’un petit atelier où il poursuit son travail dans la même veine qu’à Drenthe. C’est la période sombre de Van Gogh, se caractérisant par une palette réduite ignorant totalement les couleurs vives. Mais, avec la maîtrise du dessin et le regard unique porté sur le monde, le grand artiste apparaît à cette époque. Van Gogh exprime enfin ce qu’il portait en lui depuis toujours. Évidemment, des influences conduisent le peintre vers cette peinture réaliste et pessimiste. Il s’agit surtout d’un groupe de peintres de la Haye s’inspirant des artistes de l’École de Barbizon (par exemple Théophile de Bock, 1851-1904). C’est à cette époque que Van Gogh réalise un tableau désormais célèbre, Les mangeurs de pommes de terre.
Vincent van Gogh. Les mangeurs de pommes de terre (avr. 1885)
Huile sur toile, 83 × 116 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Au cours de son séjour chez ses parents, Vincent s’éprend d’une voisine, Margot Begemann, qui tente de se suicider. Son père meurt en mars 1885 d’une crise cardiaque. Ces évènements tragiques l’amènent à repartir. Il séjourne quelques mois à Anvers fin 1885-début 1886, puis décide de rejoindre son frère Théo à Paris.
La France et l’explosion des couleurs (1886-1890)
Théo gère désormais à Montmartre la galerie Boussod, Valadon & Cie et loue un appartement à Montmartre où il accueille son frère. C’est évidemment par l’intermédiaire de Théo que Vincent rencontre de nombreux artistes, impressionnistes ou non. Parmi eux, citons Camille Pissarro, Georges Seurat, Henri Rousseau, Paul Cézanne. Les impressionnistes organisent en 1886 leur huitième et dernière exposition.
Vincent van Gogh. Le père Tanguy (Automne 1887)
Huile sur toile, 92 × 75 cm, musée Rodin, Paris.
En 1886-87, van Gogh étudie à l’école de peinture de Fernand Cormon (1845-1924), professeur à l’École de Beaux-arts de Paris et qui avait créé une école privée appelée Atelier Cormon. Il y rencontre Émile Bernard et Henri de Toulouse-Lautrec qui lui fait découvrir la vie nocturne de Montmartre. Il entame une liaison avec Agostina Segatori (1841-1910), modèle de nombreux peintres et tenancière du Café Tambourin.
La découverte des tendances novatrices de la peinture française conduit Van Gogh à éclaircir considérablement sa palette. Impressionnisme, pointillisme, synthétisme bouleversent l’horizon des possibles chez le grand artiste, qui évolue à une vitesse prodigieuse, comme si le temps allait lui manquer. Il peint des natures mortes, des portraits, de scènes de rue, faisant exploser les couleurs. Mais les abus de la vie nocturne et de l’absinthe n’améliorent pas son état psychologique.
En février 1888, van Gogh quitte Paris et s’installe à Arles. La lumière méditerranéenne ne pouvait lui échapper. Il loge d’abord à l’hôtel puis loue La maison jaune, sujet d’un de ses tableaux. Il parcourt la région et réalise des paysages, des scènes de moissons, des vergers en fleurs, des portraits. La première série des tournesols date de cette période. Les tableaux sont envoyés à Théo à Paris mais ne trouvent pas preneur.
Vincent van Gogh. La chambre de van Gogh à Arles (sept. 1889)
Huile sur toile, 57 × 74 cm, musée d’Orsay, Paris.
Gauguin vient rejoindre van Gogh à Arles en octobre 1888 dans le but de travailler ensemble. Mais tout oppose les deux artistes, style, personnalité, approche de la peinture. Le 23 décembre, van Gogh menace Gauguin avec un rasoir et s’automutile l’oreille droite. Théo fit le voyage depuis Paris pour assister son frère, qui fut hospitalisé. Dès le 7 janvier 1889, le peintre est à nouveau à son domicile où il peint Autoportrait à l’oreille bandée.
Mais la santé mentale de van Gogh se dégrade rapidement. Il se plaint d’entendre des voix et doit être interné en mai 1889 à l’asile d’aliénés Saint-Paul-de-Mausole à Saint-Rémy-de-Provence. Malgré des crises de démence fréquentes, il continue à peindre, une pièce lui ayant été réservée au rez-de-chaussée pour y installer son atelier. Van Gogh quitte l’asile le 19 mai 1890 pour se rapprocher du docteur Gachet que lui conseille son frère Théo.
Vincent van Gogh. Le jardin de l’hôpital Saint-Paul (déc. 1889)
Huile sur toile, 72 × 91 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Outre son activité médicale, Paul Gachet (1828-1909) est aussi mécène et peintre (il signe Van Ryssel). Il est installé à Auvers-sur-Oise, à une trentaine de kilomètres de Paris. Van Gogh loue une chambre à l’auberge Ravoux et fréquente la maison du docteur Gachet qui le suit médicalement et apprécie son travail d’artiste. Il parcourt la campagne et réalise environ soixante-dix toiles. Mais, eu égard aux connaissances psychiatriques de l’époque, sa maladie mentale n’est pas vraiment prise en charge. Le 27 juillet 1890, alors qu’il peint un paysage en plein air, il se tire une balle de revolver dans la poitrine. Il est capable de revenir jusqu’à sa chambre. L’aubergiste, alerté par ses gémissements, prévient le docteur Gachet, dont les soins ne sont pas suffisants. Vincent van Gogh meurt le 29 juillet 1890, à l’âge de 37 ans, dans sa chambre de l’auberge Ravoux, son frère Théo étant à ses côtés.
Théo, atteint de syphilis, ne survivra que quelques lois à son frère. Il retourne aux Pays-Bas et décède à Utrecht le 25 janvier 1891.
Vincent van Gogh. Le docteur Paul Gachet (juin 1890)
Huile sur toile, 68 × 57 cm, musée d’Orsay, Paris.
Œuvre
Une production immense et dispersée dans le monde entier
Largement ignoré de son vivant, van Gogh est aujourd’hui unanimement considéré comme un génie de la peinture. La raison en est simple. Il exprime sa vision du monde, et donc son monde intérieur, avec un style unique, immédiatement reconnaissable par quiconque. Ce génie tourmenté portait en lui une richesse qu’il eut mille difficultés à communiquer. Mais lorsque, tardivement, il choisit la peinture, parce qu’il était doué en dessin, il parvint en dix ans à construire l’un des univers picturaux les plus originaux de l’histoire. Peut-être avait-il tout dit. Il quitta ce monde précipitamment.
Il nous lègue plus de 2000 œuvres comprenant environ 900 tableaux et 1100 dessins. Le musée van Gogh d’Amsterdam possède la collection la plus importante : environ 220 tableaux, 500 dessins de 800 lettres. Toujours aux Pays-Bas, le musée Kröller-Müller à Otterlo détient 91 toiles et 180 dessins de l’artiste, ce qui représente la deuxième collection mondiale.
Pour le reste, les œuvres sont dispersées dans de nombreux musées ou des collections privées. Par exemple, l’Art Institute de Chicago, le Metropolitan Museum of Art de New York et la National Gallery of art de Washington possèdent chacun une vingtaine d’œuvres ; les Fine Arts Museums of San Francisco, une trentaine. La National Gallery de Londres détient 7 tableaux. En France, c’est le musée d’Orsay qui possède la collection la plus importante avec environ une trentaine de tableaux de Van Gogh.
Une évolution ultra-rapide qui embrasse toutes les innovations de l’époque
Sur dix années de production, van Gogh a considérablement évolué. Il se situe à l’épicentre des innovations artistiques de la fin du 19e siècle, préfigurant certains courants qui apparaîtront après sa mort, comme le fauvisme ou l’expressionnisme. Admirateur de Jean-François Millet (1874-1875), peintre du courant réaliste français célèbre pour ses peintures de la ruralité, van Gogh s’intéresse d’abord à la campagne néerlandaise et à ses habitants. Paysages, portraits, activités des hommes vont être ses principales sources d’inspiration entre 1880 et 1885.
Vincent van Gogh. La sage-femme (déc. 1885)
Huile sur toile, 50 × 40 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
Son arrivée à Paris, début 1886 le confronte au bouillonnement novateur de la peinture française de cette époque. L’impressionnisme s’installe, le postimpressionnisme apparaît avec toutes ses variantes. L’artiste commence par beaucoup de natures mortes où s’affirme le style unique qui le caractérise : couleurs vives, contrastes appuyés, touches visibles avec des empâtements. Les paysages de Paris et de sa région lui offrent également une source d’inspiration (années 1886-1887).
Vincent van Gogh. Fritillaires, couronne impériale dans un vase de cuivre (mai 1887)
Huile sur toile, 74 × 61 cm, musée d’Orsay, Paris.
La découverte de la lumière méditerranéenne, avec l’installation à Arles début 1888, permet à van Gogh d'exploiter tout son potentiel. Lumière diurne ou lumière nocturne sont pour lui l’occasion de libérer complétement sa palette et de nous offrir sa vision unique, resplendissante de couleurs, de notre monde. Il a une période impressionniste marquée, avec des tableaux d’arbres en fleurs, des paysages, des portraits d’arlésiens. Mais l’influence de Gauguin le déporte parfois vers le synthétisme et il explore également le pointillisme ou néo-impressionnisme, mais avec modération et sans en faire une technique systématique comme Seurat ou Signac.
Son séjour à l’asile d’aliénés de Saint-Rémy-de-Provence de mai 1889 à mai 1890 le conduit à peindre son environnement immédiat, c'est-à-dire le jardin de l’asile et la campagne qui l’entoure : paysages, fleurs avec un intérêt marqué pour les Iris, quelques scènes de paysans au travail.
Vincent van Gogh. Les iris (mai 1889)
Huile sur toile, 74,3 × 94,3 cm, J. Paul Getty Museum, Los Angeles.
Les dernières peintures à Auvers-sur-Oise comportent de nombreux paysages de la région et des portraits, en particulier ceux du docteur Gachet, qui le soignait, et de sa fille. Les paysages paisibles de l’Île-de-France se transforment sous le pinceau de van Gogh en un univers chaotique, vivement coloré et puissamment travaillé avec des fortes épaisseurs de peinture. La folie de l’artiste est capable d’hypnotiser le spectateur. Voilà sa force.
Vincent van Gogh. Chaumes de Cordeville (juin 1890)
Huile sur toile, 73 × 92 cm, musée d’Orsay, Paris.
Un style singulier, universellement admiré
C’est le rapport entre une vision du monde et une technique picturale qui fait le style. Après la période sombre hollandaise, correspondant à une évolution mystique, van Gogh comprend qu’il doit emprunter un autre chemin pour s’exprimer pleinement. Il projettera donc sur la toile sa perception du réel avec des couleurs vives, souvent des couleurs complémentaires : rouge-vert, bleu-orange, jaune-violet. Il peint rapidement, de façon heurtée, en utilisant des empâtements qui peuvent être placés au couteau.
Vincent van Gogh. Terrasse de café le soir (1888), détail
Huile sur toile, 80,7 × 65,3 cm, Musée Kröller-Müller, Otterlo.
Son regard est celui d’un être ultrasensible qui capte avec une acuité particulière la structure du réel et ses dominantes chromatiques. Il compose paysages, portraits, natures mortes en restituant une image intériorisée qui ne sera pas acceptée de son vivant, à quelques rares exceptions près. Mais il s’est avéré rapidement par la suite que le regard de van Gogh sur le monde avait une portée universelle. Ses peintures de la période française émeuvent spontanément et rencontrent l’adhésion de tous.
Puissance du dessin, richesse chromatique exceptionnelle, force des empâtements sont au service d’une vision très singulière, à la fois démesurée, chaotique et poétique. Van Gogh accède à l’universalité précisément par cette singularité.
Vincent van Gogh. L'église d'Auvers-sur-Oise, vue du chevet (juin 1890)
Huile sur toile, 94 × 74 cm, musée d’Orsay, Paris.
La Haye (1881-1883)
Vincent van Gogh. Nature morte au chapeau de paille jaune (déc. 1881). Huile sur toile, 37 × 54 cm, musée Kröller-Müller, Otterlo. Cette composition a été préparée avec la collaboration d’Anton Mauve, cousin par alliance de Van Gogh et peintre installé à La Haye. Anton Mauve a enseigné le dessin et la peinture à Van Gogh de fin 1881 à fin 1883. |
Nuenen (1884-1885)
Vincent van Gogh. Parterres de fleurs en Hollande (avr. 1883). Huile sur toile sur bois, 49 × 66 cm, National Gallery of Art, Washington. « Il semble probable que Parterres de fleurs en Hollande faisait partie des œuvres que l'artiste abandonna à Nuenen lorsqu'il partit précipitamment vers Anvers fin 1885. Ces œuvres furent transférées à Breda en 1886, lorsque la mère et la sœur de Van Gogh, Willemina, déménagèrent vers la ville, puis stockées chez un charpentier de Breda, Adrianus Schrauwen. » (Notice National Gallery of Art). |
Vincent van Gogh. Les mangeurs de pommes de terre (avr. 1885). Huile sur toile, 83 × 116 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam. Après leur journée de travail, des paysans néerlandais mangent des pommes de terre en se servant dans un plat unique placé au centre de la table. Les visages aux traits grossiers exprimant tristesse et fatigue, la faible lumière, le cadre austère de la petite pièce font de ce tableau célèbre une étude très naturaliste des paysans pauvres de la fin du 19e siècle. Van Gogh était influencé à cette époque par les peintres du réalisme social de l’école de La Haye. Réalisée à Nuenen après de multiples études de têtes, cette composition de la période sombre fait apparaître pour la première fois la puissance expressive de l’artiste. Et déjà, sans le jaillissement des couleurs de la période française, Van Gogh maîtrise un style à nul autre pareil. |
Anvers (1885)
Vincent van Gogh. La sage-femme (déc. 1885). Huile sur toile, 50 × 40 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam. Encore appelé Tête d'une vieille femme avec un bonnet blanc, ce tableau fait partie des nombreux portraits de gens du peuple que réalisa l’artiste en 1885. Seul le visage est étudié avec soin, le reste étant rapidement suggéré. Le dessin puissant fait ressortir les traits que le peintre accentue par des empâtements ocre. Le regard sans concession est celui d’une femme habituée aux réalités humaines. |
Paris (1886-1888)
Vincent van Gogh. Fritillaires, couronne impériale dans un vase de cuivre (mai 1887). Huile sur toile, 74 × 61 cm, musée d’Orsay, Paris. « Les fritillaires sont des plantes à bulbe qui, comme les tulipes, fleurissent au printemps [...] Lorsqu'il réalise ce tableau, Vincent réside à Paris et entretient une relation étroite avec Paul Signac. Il n'est donc pas surprenant de constater que Van Gogh applique dans son œuvre quelques-uns des principes de la peinture néo-impressionniste dont Signac est l'un des représentants majeurs : la touche pointilliste est utilisée pour le fond du tableau et un contraste de couleurs complémentaires, bleu et orangé, domine la composition. Mais l'influence des théories néo-impressionnistes reste limitée. La touche divisée n'est utilisée que pour une surface déterminée, le jeu des couleurs complémentaires ne limite aucunement Van Gogh dans le choix des teintes, enfin, en choisissant une nature morte, il s'écarte des thèmes traités par Seurat et ses suiveurs. » (Commentaire musée d’Orsay)
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Vincent van Gogh. Le père Tanguy (Automne 1887). Huile sur toile, 92 × 75 cm, musée Rodin, Paris. « Julien-François Tanguy (1825-1894) tient une petite boutique de couleurs, rue Clauzel, et accepte souvent des tableaux en échange de ses marchandises. Il en prend souvent aussi en dépôt pour en favoriser la vente. |
Arles (1888-1889)
Vincent van Gogh. Souvenir de Mauve (mars 1888). Huile sur toile, 73 × 60 cm, musée Kröller-Müller, Otterlo. Cousin par alliance de Van Gogh, le peintre néerlandais Anton Mauve avait appris à Van Gogh les techniques de l’aquarelle et de l’huile. Le jour où il réalise ce tableau, il reçoit une lettre de sa sœur qui lui annonce la mort de Mauve. L’artiste lui dédie alors cette peinture en inscrivant en bas Souvenir de Mauve Vincent & Theo. Il écrit à son frère Théo : « Nous l’enverrons à Mme Mauve avec nos deux noms […] Il me semblait qu'en mémoire de Mauve nous avions besoin de quelque chose de tendre et de très joyeux et non d'une étude plus sérieuse que celle-là. »
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Vincent van Gogh. Vue des Saintes-Maries-de-la-Mer (juin 1888). Huile sur toile, 64 × 53 cm, musée Kröller-Müller, Otterlo. Fin mai 1888, Vincent van Gogh visite les Saintes-Maries-de-la-Mer, village de pêcheurs sur la Méditerranée. « Il reste quelques jours dans le village de pêcheurs et, dans cette courte période, fait neuf dessins, deux peintures avec des scènes de plage et des paysages maritimes avec des bateaux de pêche ainsi que cette peinture des Saintes-Maries-de-la-Mer. […] Van Gogh représente les maisons construites à proximité les unes des autres par des aplats de différentes couleurs. Les côtés des maisons face au soleil sont peints dans des teintes chaudes et légères, et les côtés ombragés en bleu. Outre les plants de lavande, le tableau est dominé par le "bleu vert du ciel chauffé à blanc", selon la description qu’il fait de la lumière de la Provence dans une de ses lettres. » (Commentaire musée Kröller-Müller)
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Vincent van Gogh. Terrasse de café le soir (sept.1888). Huile sur toile, 80,7 × 65,3 cm, musée Kröller-Müller, Otterlo. Van Gogh cherche à dépasser les conventions de l'esthétique de la représentation : la nuit est noire, donc il convient de la représenter sur la toile avec du noir sur lequel se détachent des éléments de "lumière blafarde et blanchâtre", selon une expression qu’il utilise dans une lettre. Il veut au contraire montrer une nuit aux couleurs vives en peignant sur le motif et peut-être, dit-il, en se trompant parfois sur la tonalité exacte. Mais après tout, cela n'est que le résultat de la perception nocturne des couleurs et ne contredit pas l'objectif poursuivi. Le génie du grand artiste est là : utiliser du jaune, du bleu, du mauve, du vert, tout en donnant au spectateur une impression complétement nocturne.
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Vincent van Gogh. Nuit étoilée sur le Rhône (sept.1888). Huile sur toile, 72,5 × 92 cm, musée d'Orsay, Paris. La nuit intéresse beaucoup Van Gogh. Il la juge « encore plus richement colorée que le jour, colorée des violets, des bleus et des verts les plus intenses. » Le tableau a été peint à Arles sur les bords de Rhône, de façon à saisir les reflets de l’éclairage urbain au gaz sur la surface du fleuve. Le ciel étoilé, d’un bleu profond et traité en empâtements, est caractéristique de la perception de van Gogh. Ce bleu rappelle d’ailleurs les ciels de Giotto et nous renvoie en réalité à une ancienne tradition picturale (voir par exemple Giotto, Noli me tangere, 1304-06).
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Vincent van Gogh. Café de nuit (sept. 1888). Huile sur toile, 71 × 90 cm, Yale University Art Gallery, New Haven. Le tableau représente le Café de la Gare, à Arles, à une heure avancée de la nuit (l’horloge marque minuit un quart). Il illustre la solitude du peintre à Arles. La composition est découpée en bandes horizontales de couleur rouge, jaune et verte et l’effet de perspective n’est pas rigoureusement mathématique, mais volontairement disloqué. Les grands aplats de couleur éloigne l’artiste de l’impressionnisme et l’amène sur la voie du fauvisme.
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Vincent van Gogh. L'Arlésienne : Madame Ginoux (nov 1888). Huile sur toile, 91 × 74 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. Madame Ginoux (1848-1911) était la propriétaire du Café de la Gare, où Van Gogh vécut à Arles entre mai et septembre 1888, avant de louer et d’emménager dans la Maison Jaune voisine. Van Gogh peint cette femme dans son costume traditionnel d’apparat de la région d’Arles. Le peintre écrit à son frère Théo : « J'ai enfin une Arlésienne, une figure sabrée dans une heure, fond citron pâle, le visage gris, l'habillement noir, noir noir, du bleu de prusse tout cru. Elle s'appuie sur une table verte et est assise dans un fauteuil de bois orangé. » L’influence de Gauguin, présent à Arles à cette époque, transparaît dans les grands aplats de couleur pure qui proviennent du synthétisme.
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Vincent van Gogh. Tournesols (janv. 1889). Huile sur toile, 92 × 71 cm, Philadelphia Museum of Art. « Alors qu'il attendait Paul Gauguin qui devait le rejoindre dans la ville provençale d'Arles en 1888, Vincent van Gogh a peint cinq natures mortes de tournesols audacieusement décoratives dans de simples cruches en terre cuite. Au moins deux de ces toiles ont décoré la chambre de Gauguin quand il rejoignit la ville à la fin d'octobre, et le peintre français les admirait beaucoup. » (Commentaire Philadelphia Museum of Art). |
Saint-Rémy-de-Provence (1889-1890)
Vincent van Gogh. Les iris (mai 1889). Huile sur toile, 74,3 × 94,3 cm, J. Paul Getty Museum, Los Angeles. La composition saisit l’observateur par sa puissance évocatrice et son chromatisme radical. Il s’agit bien de l’enchevêtrement caractéristique d’un massif d’iris. Les fleurs, présentant des caractéristiques communes mais des formes différenciées, émergent des feuilles allongées aux multiples courbures. Van Gogh a bien observé les iris et en fait une représentation formelle réaliste et forte. La force de l’image provient de la capacité de l’artiste à capter l’essentiel et à le restituer : entrecroisements des feuilles, fleurs éclatées.
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Vincent van Gogh. La nuit étoilée (juin 1889). Huile sur toile, 74 × 92 cm, Museum of Modern Art, New York. « "Ce matin, j'ai vu la campagne de ma fenêtre longtemps avant le lever du soleil, avec rien que l'étoile du matin, qui avait l'air très grande", a écrit van Gogh à son frère Théo, de France. Enracinée dans l'imagination et la mémoire, La nuit étoilée incarne une expression intérieure et subjective de la perception de la nature chez van Gogh. Avec des touches épaisses, un cyprès en forme de flamme relie le ciel bouillonnant et le paisible village en contrebas. Le village a été en partie inventé, et la flèche de l'église évoque la terre natale de van Gogh, les Pays-Bas. » (Commentaire MoMA)
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Vincent van Gogh. La chambre de van Gogh à Arles (sept. 1889). Huile sur toile, 57 × 74 cm, musée d’Orsay, Paris. « Dans une lettre adressée à son frère Théo, Vincent explique ce qui l'incite à peindre une telle œuvre : il veut exprimer la tranquillité et faire ressortir la simplicité de sa chambre au moyen du symbolisme des couleurs. Pour cela, il décrit : "les murs lilas pâle, le sol d'un rouge rompu et fané, les chaises et lit jaune de chrome, les oreillers et le drap citron vert très pâle, la couverture rouge sang, la table à toilette orangée, la cuvette bleue, la fenêtre verte", affirmant : "J'avais voulu exprimer un repos absolu par tous ces tons divers".
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Vincent van Gogh. Le jardin de l’hôpital Saint-Paul (déc. 1889). Huile sur toile, 72 × 91 cm, van Gogh Museum, Amsterdam. « Cette peinture représente le jardin de l’hôpital de Saint-Rémy où van Gogh a passé une année. Il y travaillait régulièrement lorsque sa maladie l'empêchait de s'aventurer dehors. Van Gogh écrivit à son ami Bernard à propos de ce tableau: "Tu comprendras que cette combinaison d'ocre rouge, de vert grisé, de lignes noires qui définissent les contours, cela rappelle un peu l'angoisse dont certains de mes compagnons d'infortune souffrent souvent, et qu'on appelle voir rouge".
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Vincent van Gogh. Les iris (mai 1890). Huile sur toile, 92,1 × 73,7 cm, Metropolitan Museum of Art, New York. « En mai 1890, juste avant de quitter l'asile de Saint-Rémy, van Gogh peint quatre exubérants bouquets de fleurs printanières, les seules natures mortes de quelque ambition qu'il ait réalisées durant son séjour d'un an. Deux représentent des iris et deux représentent des roses, avec des différences importantes de couleurs et de formes. Dans Les Iris du MET, il cherche un effet "harmonieux et doux" en plaçant les fleurs "violette" sur un "fond rose", ces couleurs s’étant estompées depuis en raison de l’utilisation de pigments rouges instables. » (Commentaire MET) |
Auvers-sur-Oise (mai-juillet 1890)
Vincent van Gogh. Le docteur Paul Gachet (juin 1890). Huile sur toile, 68 × 57 cm, musée d’Orsay, Paris. « Figure inséparable de la dernière période de la vie de Vincent à Auvers, le docteur Gachet revêtait une personnalité originale. Médecin homéopathe s'intéressant à la chiromancie, sa véritable passion le portait vers les arts. Il était lui-même un bon graveur et entretenait des relations avec une multitude d'artistes, parmi lesquels Manet, Monet, Renoir et Cézanne. C'est donc naturellement que van Gogh se présenta chez lui au lendemain de son internement à Saint-Rémy-de-Provence, sur les conseils de son frère Théo. Spécialisé en psychiatrie, le praticien aida de son mieux Vincent à vaincre ses angoisses tout en lui offrant un confort matériel propice à l'épanouissement.
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Vincent van Gogh. L'église d'Auvers-sur-Oise, vue du chevet (juin 1890). Huile sur toile, 94 × 74 cm, musée d’Orsay, Paris. « Ce tableau est le seul que Vincent van Gogh a consacré à l'église d'Auvers. Cette église, construite au XIIIe siècle dans le premier style gothique, flanquée de deux chapelles romanes, devient, sous le pinceau de l'artiste, un monument flamboyant qui semble prêt à se disloquer sous une pression venue du sol et des deux chemins qui l'enserrent. Si l'on compare ce tableau avec les Cathédrales de Claude Monet, peintes peu de temps après, on mesure ce qui sépare la démarche de van Gogh de celle des impressionnistes. Contrairement à Monet, il ne cherche pas à rendre l'impression des jeux de la lumière sur le monument. Même si l'église reste reconnaissable, la toile propose moins au spectateur une image fidèle de la réalité qu'une forme d' "expression" de celle-ci. Les moyens plastiques utilisés par van Gogh annoncent le travail des fauves et des peintres expressionnistes. » (Commentaire musée d’Orsay)
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Vincent van Gogh. Chaumes de Cordeville (juin 1890). Huile sur toile, 73 × 92 cm, musée d’Orsay, Paris. « C'est à une véritable transmutation impulsée par des forces psychiques que le peintre soumet ici le paysage. Les tranquilles maisons aux toits de chaume que l'on peut encore observer sur d'anciennes photographies paraissent soulevées par quelque puissante force tellurique qui dilate les volumes. Le dessin échevelé, tourbillonnant, fait onduler le toit, enroule en spirale les branches d'arbre, transforme les nuages en arabesques... De plus, la matière picturale est travaillée en pleine pâte, creusée dans son épaisseur par de véritables sillons.
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Vincent van Gogh. Mademoiselle Gachet dans son jardin (juin 1890). Huile sur toile, 46 × 55 cm, musée d’Orsay, Paris. Marguerite Gachet apparaît en robe blanche au milieu du jardin abondamment fleuri de son père. Le paysage apocalyptique, comme tous ceux des dernières années de la vie de l’artiste, correspond à un regard sur la nature dépourvu de toute quiétude, révélateur du trouble mental qui allait emporter le peintre le mois suivant. Van Gogh a peint deux tableaux de la fille du docteur Gachet, l’un au jardin, l’autre au piano. Alors âgée de vingt-et-un ans, Marguerite Gachet était perçue comme une amie par le peintre, mais son père n’avait pas autorisé les séances de pose. Lorsqu’il apprit l’existence des tableaux, il interdit toute rencontre entre Vincent et Marguerite, sauf présence d’un tiers. Van Gogh écrira ensuite à son frère Théo qu’il était fort malheureux de ne pas avoir d’amitié féminine. |
Quelques dessins
Vincent van Gogh. Presbytère et église à Etten (1876). Crayon et encre sur papier, 18 × 9,5 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
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Vincent van Gogh. Portrait de femme (1882-83). Crayon et encre sur papier, 39 × 25 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
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Vincent van Gogh. La guinguette (1887). Crayon et mine de plomb sur papier, 38 × 50 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
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Vincent van Gogh. Portrait du facteur Joseph Roulin (1888). Plume et encre sur papier, 32 × 24 cm, J. Paul Getty Museum, Los Angeles.
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Vincent van Gogh. Fontaine du Jardin de l'hôpital Saint-Paul (1889). Craie, crayon et encre sur papier, 49,5 × 46 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam.
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Vincent van Gogh. Mademoiselle Gachet au piano (1890). Crayon sur papier, 32 × 24 cm, Van Gogh Museum, Amsterdam. |
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