Richard Wilson
Patrick AULNAS
Portrait
Raphaël Mengs. Portrait de Richard Wilson (1752)
Huile sur toile, 84,6 × 75,2 cm, National Museum, Cardiff.
Biographie
1714-1782
Fils d’un ecclésiastique, Richard Wilson est né en 1714 à Penegoes, dans le Montgomeryshire (Pays de Galles). En 1729, il s’installe à Londres pour étudier l’art du portrait avec un peintre peu connu, Thomas Wright. A partir de 1735, il commence à réaliser des portraits pour son propre compte et trouve rapidement une clientèle car il est un portraitiste de grand talent. Il commence à s’intéresser au paysage vers 1746 et le voyage en Italie qu’il entreprend en 1750 va confirmer sa vocation de paysagiste.
Richard Wilson. Rome vue de la Villa Madame (1753)
Huile sur toile, 95,4 × 132,7 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut.
Il reste sept années en Italie et rencontre d’abord à Venise le paysagiste Francesco Zuccarelli (1702-1788) qui jouera un rôle décisif dans sa réorientation. En 1752, il part pour Rome où il reste jusqu’à 1757, année de son retour en Angleterre. Dans la Ville Éternelle, il fréquente de nombreux artistes et en particulier Joseph Vernet (1714-1789), peintre français célèbre pour ses marines, et Raphaël Mengs (1728-1779), peintre allemand néo-classique. Wilson réalise à cette époque, pour les aristocrates anglais voyageant en Italie, des paysages classiques et des dessins de sites et d’édifices romains. Il est un dessinateur tout à fait remarquable.
De retour à Londres, il devient un professeur connu et produit des paysages classiques qu’il expose en tant que membre de la Society of Artists. En 1768, il est membre fondateur de la Royal Academy où il exposera plusieurs dizaines d’œuvres jusqu’à 1780.
Mais le travail de Richard Wilson ne bénéficie pas de la faveur royale. Georges III (1738-1820) n’apprécie pas les paysages classiques de Wilson et, n’ayant pas obtenu de commandes royales, sa cote de popularité reste modeste. Les commandes se font rares et il doit travailler à partir de 1776 comme bibliothécaire à la Royal Academy. Son activité de peintre devient alors très réduite. Il finit sa vie dans une grande pauvreté.
Wilson décède à Colomendy (Denbighshire, Pays de Galles) le 15 mai 1782. Il est inhumé dans le parc de l’église Sainte Mary à Mold (Flintshire).
Œuvre
Richard Wilson a profondément marqué l’art du paysage en Angleterre. Il se situe dans la lignée des grands peintres classiques français du 17e siècle, dont Claude Lorrain auquel il emprunte la rigueur formelle et la maîtrise des effets de lumière, en particulier le contre-jour. La contemplation de la nature et la volonté de transmettre d’elle une image poétique et idéalisée le rattache aussi au grand paysagiste français. Également admirateur du néerlandais Albert Cuyp (1620-1691), Wilson lui emprunte les grands ciels nuageux laissant filtrer une lumière atténuée.
L’originalité de Wilson au 18e siècle est tout à fait saisissante. Héritier du paysage classique par sa volonté d’idéalisation de la nature, il parvient cependant à introduire dans ses compositions un réalisme poétique très nouveau. Ce grand artiste apparaît ainsi comme l’un des premiers peintres préromantiques.
Richard Wilson. Le val de Narni (v. 1760)
Huile sur toile, 66 × 48 cm, collection particulière.
Son influence fut considérable sur la peinture de paysage britannique. John Constable l’admirait et on prétend que J. M. W. Turner parcourait dans sa jeunesse les lieux figurant dans les tableaux de Wilson pour trouver les endroits précis d’où ils étaient peints. Mais Richard Wilson fut largement oublié au 20e siècle, sinon de quelques historiens. L’intérêt pour son œuvre ne réapparaît que depuis quelques décennies.
Les portraits
Richard Wilson. Boulter Tomlinson (1740). Huile sur toile, 127 × 101 cm, National Museum Wales, Cardiff. Boulter Tomlinson était un gentleman qui vivait à Cheltenham, station thermale du comté de Gloucester. Le portrait est construit sur un arrière-plan architectural (colonnes, fontaine) visant à mettre en évidence le statut social du modèle, qui prend la pose avec une raideur de gentleman britannique du 18e siècle.
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Richard Wilson. Commodore Thomas Smith (v. 1744). Huile sur toile, 126 × 102 cm, National Maritime Museum, Greenwich. Thomas Smith est le fils naturel de Sir Thomas Lyttelton, l’un des premiers mécènes de Richard Wilson. Il était à l’époque du portrait commodore de la marine royale britannique, mais il fut ensuite élevé au grade d’amiral. Ce portrait reste très classique : le personnage cherche à mettre en valeur son statut social par les riches vêtements, la perruque et la longue-vue symbolisant son grade dans la marine royale. Il ne cache pas, bien au contraire, son ventre proéminent, signe de richesse et de puissance. Il s’agit donc, très banalement, d’en imposer. Le peintre répond remarquablement aux souhaits du modèle.
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Richard Wilson. Le prince George and et le prince Edward Augustus (1748-49). Huile sur toile, 76,5 × 63,5 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut. De gauche à droite, le prince George, futur roi George III (1738-1820), le prince Edouard-Auguste (1739-1767) et Francis Ayscough (1701-1763), homme de cour et d’église et tuteur des enfants. |
Les paysages
Richard Wilson. Vaste paysage avec cottages près d’un lac (1745). Huile sur toile, 124,8 × 81,3 cm, North Carolina Museum of Art, Raleigh. Les premiers paysages de Wilson sont imprégnés de poésie et se singularisent par une influence hollandaise, qui transparaît dans le réalisme des figures, et une composition d’ensemble très classique baignant dans une lumière rappelant Claude Lorrain.
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Richard Wilson. Rome vue de la Villa Madame (1753). Huile sur toile, 95,4 × 132,7 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut. Richard Wilson fut orienté vers le paysage par le peintre français Joseph Vernet. Comme lui, il réalisait des esquisses à l'huile prises sur le motif puis les utilisait pour composer un paysage selon les critères du paysage héroïque du 17e siècle. On retrouve donc chez lui le soin apporté à la lumière par Claude Lorrain et la rigueur de la composition classique. Cette vue de Rome est prise depuis la villa Madame (villa Madama) située au pied du Monte Mario dans la campagne romaine. Cette villa est aujourd'hui utilisée par le gouvernement italien pour accueillir les chefs d'État étrangers.
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Richard Wilson. Vue éloignée de la villa de Mécène, Tivoli (1756-57). Huile sur toile, 122 × 170 cm, Tate, Londres. Tivoli est une ville de la province de Rome particulièrement riches en vestiges de l’Antiquité romaine. La villa dite de Mécène, ou temple d’Hercule Victorieux, est une structure monumentale datant du 1er siècle avant J.-C. Mécène (v. 70-8 av. J.-C.) était un patricien romain proche de l’empereur Auguste qui consacra sa fortune à promouvoir les arts et lettres. Cette composition a été réalisée à partir d’un dessin pris par Wilson à Tivoli en avril 1854.
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Richard Wilson. Saint-Pierre et le Vatican depuis le Janicule (1857). Huile sur toile, 94 × 155 cm, Art Gallery of New South Wales, Sydney. Cette vue panoramique de la cité du Vatican permet d’apprécier le caractère agreste de Rome au milieu du 18e siècle. Le Janicule (Gianicolo) est la huitième colline de Rome, située sur la rive droite du Tibre, au sud du Vatican. Culminant à 146 mètres, cette colline offre à Wilson une vue légèrement plongeante sur la campagne romaine. La présence au premier plan de pâtres en tenue vaguement antique et d’un morceau de bas-relief témoigne de l’influence des classiques sur l’artiste gallois.
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Richard Wilson. Le val de Narni (v. 1760). Huile sur toile, 66 × 48 cm, collection particulière. Narni est une petite ville italienne située en Ombrie. Wilson utilise le paysage local pour construire une composition emprunte de romantisme tout en respectant les contraintes du paysage classique. Il introduit ainsi dans le classicisme une dimension poétique nouvelle et sera considéré comme un précurseur par les peintres romantiques du 19e siècle.
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Richard Wilson. Vue de Syon House sur la Tamise près de Kew Gardens (v. 1760). Huile sur toile, 104 × 109 cm, Neue Pinakothek, Munich. Les berges de la Tamise au milieu du 18e siècle, lieu de détente et de canotage pour les privilégiés. Syon House, que l’on aperçoit sur la rive opposée, était un couvent fondé par Henry V en 1414.
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Richard Wilson. Paysage italien (matin) (1860-65). Huile sur toile, 94,6 × 70,2 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut. Wilson s’inspire assez librement d’un dessin réalisé en Italie au début des années 1750 pour construire un paysage matinal parfaitement maîtrisé, avec ruine antique et lumière naissante en contre-jour,
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Richard Wilson. Kew Gardens : la pagode et le pont (1762). Huile sur toile, 73 × 47,6 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut. Les jardins de Kew sont situés à l’ouest de Londres et comporte aujourd’hui un vaste ensemble de serres abritant plus de 30 000 espèces de végétaux. La pagode, édifiée en 1762, était donc toute récente au moment de la réalisation du tableau. La composition baigne dans une lumière vespérale venant de l’horizon, emprunt au grand maître Claude Lorrain, dont l’influence a été considérable dans le monde anglo-saxon.
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Richard Wilson. Vue de Snowdon depuis Llyn Nantlle (v. 1766). Huile sur toile, 100 × 127 cm, Castle Museum and Art Gallery, Nottingham. Ce paysage est composé avec une palette réduite aux bruns, verts et bleus et respecte les règles d’équilibre du classicisme. Mais l’atmosphère transparente et l’utilisation magistrale d’une lumière limpide et tamisée introduisent une poésie nouvelle qui déporte déjà l’œuvre vers le romantisme.
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Richard Wilson. Vue de la nature sauvage dans le parc de Saint-James (1770-75). Huile sur toile, 43 × 53 cm, Yale Center for British Art, New Haven, Connecticut. St James Park, à Westminster, est le plus ancien parc royal de Londres. Le parc prit au 18e siècle une allure plus naturelle et romantique du fait de la transformation des allées rectilignes en chemins sinueux. Le jardin à l’anglaise remplaçait le jardin à la française. Wilson évoque cette esthétique nouvelle du parc dans un tableau où l’aspect jungle (titre anglais : View of the Wilderness in St. James's Park) est mis en évidence. L’artiste fait ainsi un pas vers le paysage réaliste tout en conservant la composition symétrique chère aux classiques. |
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